Le second lieutenant, Morris R. Jeppson, fut le dernier à toucher la bombe lorsqu'il plaça les fusibles d'armement. Peu avant 8h15, Enola Gay arriva au-dessus de la ville. L'ordre de bombarder fut donné par Tibbets, le major Thomas Ferebee s'exécuta en visant le pont Aioi en forme de « T », celui-ci constituant un point de repère idéal au centre de la ville. Peu après 8h15, la bombe Little Boy sortit de la soute à une altitude de 9 450 m. À 8h16m2s, après environ 43 secondes de chute libre, activée par les capteurs d'altitude et ses radars, elle explosa à 580 mètres à la verticale de l'hôpital Shima, en plein cœur de l'agglomération, à 170 m au sud-est du pont visé, libérant une énergie équivalente à environ 15 000 tonnes de TNT.

Une énorme bulle de gaz incandescent de plus de 400 mètres de diamètre se forma en quelques fractions de secondes, émettant un puissant rayonnement thermique. En dessous, la température des surfaces exposées à ce rayonnement s'est élevée un bref instant, très superficiellement, à peut-être 4000°C. Des incendies se déclenchèrent, même à plusieurs kilomètres. Les personnes exposées à ce flash furent brûlées. Celles protégées à l'intérieur ou par l’ombre des bâtiments furent ensevelies ou blessées par les projections de débris quand quelques secondes plus tard l'onde de choc arriva sur elles. Des vents de 300 à 800 km/h dévastèrent les rues et les habitations. Le long calvaire des survivants ne faisait que commencer alors que le champignon atomique, aspirant la poussière et les débris, débutait son ascension de plusieurs kilomètres.
Un énorme foyer généralisé se déclencha rapidement avec des pics de température en certains endroits. Si certaines zones furent épargnées lors de l'explosion, elles devaient par la suite affronter un déluge de feu causé par les mouvements intenses des masses d'air.
Enola Gay avait entre-temps effectué un virage serré à 155° vers le nord-ouest et rebroussait chemin. Les membres de l'équipage, protégés par des lunettes, purent assister à l'explosion. Bob Lewis, le copilote d'Enola Gay, s'écrie : « Mon Dieu, qu'avons-nous fait ? Même si je vis cent ans, je garderai à jamais ces quelques minutes à l'esprit. »
Quelques heures après l'explosion, le nuage atomique ayant atteint des zones plus froides et s'étant chargé d'humidité, la pluie se mit à tomber sur Hiroshima. C'était une pluie qui contenait des poussières radioactives et des cendres qui lui donnaient une teinte proche du noir. C'est pour cela que cette pluie a été désignée par le terme de « black rain » dans la littérature anglo-saxonne.
Ces poussières ont porté sur une zone de 30 x 15 km2 au nord-ouest du point d’explosion.

Le matin du 9 août 1945 à 3h49, le B-29 Bockscar partit de Tinian en direction du Japon. À son bord, la bombe Fat Man.
À 11 h 02, une percée dans les nuages sur Nagasaki permit au bombardier de Bockscar, le capitaine « Kermit » Beahan, de viser la zone prévue, une vallée avec des industries. Fat Man fut alors larguée et explosa à 469 mètres d'altitude…
Orchestral Manœuvres in the Dark - Enola Gay
« 6 août [1966]. J’ai fait un rêve interminable : il s’agissait d’une guerre atomique entre l’Amérique et la Chine. Jamais à l’état de veille je n’aurais pu concevoir vision pareille ni détails plus affreux, plus magnifiques : une splendeur d’enfer. Tout l’avenir se déroulait là, dans mon cerveau. Les anciens avaient raison d’accorder une valeur prophétique aux rêves : toutes nos peurs secrètes s’y projettent, toutes nos peurs clairvoyantes. » (Emil Cioran, Cahier de Talamanca, Mercure de France p. 19)
« Avec l’expression ‘holocauste nucléaire’ la société humaine tout entière a assumé l’idée de sa propre consommation sacrificielle. (Non pour obtenir quelque chose, mais pour expier tout.) » (Guido Ceronetti, Le silence du corps, trad. André Maugé, LdP p. 85)
« Après une demi-heure, tout ce qui se trouve au-dessous de nous sera devenu un unique Hiroshima, une terre qui ne conservera pas la moindre trace du fait que nous avons été là. Regarde en bas : cette planète sans hommes au-dessous de toi — n'est-elle pas peut-être déjà la terre après ce jour ? » (Günther Anders, Hiroshima est partout (Hiroshima ist überall), 1982)
Tragique intuition ? : « […] en ce jour, les cieux passeront avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, et la terre avec les œuvres qu’elle renferme sera consumée. » (2 Pierre 3, 10)

Cf. "Journal de la bombe, une vie atomique" (France culture)
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