samedi 30 décembre 2023

Coïncidence


Coran, sourate 4, verset 157 : « parce qu’ils [les juifs] ont dit : “Oui, nous avons tué le Messie, Jésus, fils de Marie, le Prophète de Dieu”. Mais ils ne l’ont pas tué ; ils ne l’ont pas crucifié, cela leur est seulement apparu ainsi. Ceux qui sont en désaccord à son sujet restent dans le doute ; ils n’en ont pas une connaissance certaine ; ils ne suivent qu’une conjecture » (trad. D. Masson).

En accord avec la plupart des traductions contemporaines, on a ici ce qui fonde la mise en doute musulmane de l'historicité de la crucifixion de Jésus. Cette compréhension de ce verset n'est pas celle retenue par les exégèses anciennes (cf. ici). Elle n’en est pas moins aujourd’hui très majoritaire dans l’ordre de la foi musulmane. En subsiste un doute sur la réalité historique de la crucifixion de Jésus, voire sa négation pure et simple.

Le lecteur qui s’en tient à cette compréhension aujourd'hui majoritaire en islam pensera : « Je ne sais pas si Jésus était sur la croix ». Il ne retiendra de ce texte que l’idée qui avait cours jusqu'à il y a peu dans le christianisme, voulant que les juifs aient crucifié Jésus (une idée erronée, qui est une source non-négligeable de l’antimémistisme) — en l’occurrence, version musulmane, que les juifs auraient prétendu de façon illusoire mettre Jésus en croix, l’y auraient mis… « paraît-il »…

Jean-Luc Mélenchon (15.07.2020) : « Je ne sais pas si Jésus était sur la croix, je sais qui l’y a mis, paraît-il. Ce sont ses propres compatriotes. »

RP

samedi 23 décembre 2023

"Le message de Noël arrive juste au bon moment"



Texte proposé par Jean-Paul Sanfourche


« … aujourd’hui, dans la ville de David, il vous est né
un Sauveur qui est le Messie, le Seigneur. » (Luc, 2,11)


C’est en ces termes émouvants que le pasteur Dietrich Bonhoeffer, du camp de concentration bavarois de Flossenburg, écrivait à sa fiancée, Maria von Wedemeyer :

« […] Combien est grand le danger de se sentir livré à un hasard aveugle, de quelle manière pernicieuse la méfiance et l’amertume s’insinuent-elles dans notre cœur, et avec combien de facilité cette idée puérile nous conquiert, comme si nous étions dans notre vie, nos chemins et nos destinées entre les mains des hommes – et lorsque tout cela nous assaille au point que nous ne pouvons guère plus nous défendre, alors le message de Noël arrive juste au bon moment. Il nous dit que toutes nos pensées sont fausses, que ce qui nous paraît mauvais et obscur est en vérité bon et lumineux, parce que cela vient de Dieu ; ce sont nos yeux seulement qui nous trompent ; Dieu est dans la crèche, la richesse dans la pauvreté, la lumière dans la nuit, le secours dans l’abandon ; il ne nous arrive rien de mal ; […] Il n’est pas question ici de l’impassibilité stoïque vis-à-vis de tous les événements extérieurs, mais d’une souffrance et d’une joie véritable, parce que nous savons que le Christ est là présent. Maria bien-aimée, fêtons Noël de cette manière. Sois au milieu des autres, aussi gaie qu’on ne peut l’être qu’à Noël. Ne t’imagine pas des images horribles de moi dans ma cellule, mais simplement que le Christ traverse aussi les prisons, et qu’il s’arrêtera dans la mienne. »

L’auteur du « Prix de la Grâce », fidèle à l’éthique de la « suivance » (Nachfolge) comme réponse à Celui qui appelle, y compris dans la souffrance, adresse cette lettre – une de ses dernières lettres – à sa fiancée, le 13 décembre 1944. Il savait que leurs « destinées » ne s’uniraient pas. Pour avoir défendu les juifs persécutés et conspiré pour mettre un terme à un régime abominable, ses jours étaient comptés. Il le pressentait. Et sur cet arrière-plan tragique, nul mieux que lui n’a parlé en si peu de mots du « message de Noël ». Tant d’épreuves, tant d’injustices, tant de douleurs et d’humiliations auraient pu être le terreau du doute – qu’il a connu et dépassé à la prison de Tregen. Faisant la part du monde et du Royaume, qu’il ne sépare jamais, les unissant dans une « réalité totale », il affirme et rappelle que nos destins ne dépendent pas des hommes mais de Dieu seul. Au venin des passions tristes, la méfiance, la crainte, l’amertume, le ressentiment, il oppose un détachement qui n’a rien de stoïque. Au creux même de sa vulnérabilité et de son impuissance, il se soustrait sans angoisse à l’injustice des hommes en se livrant avec une confiance sans réserve à Dieu, de tout son amour, de toute son âme, de toute sa pensée.

Noël, pour Bonhoeffer comme il le faudrait aussi pour nous, c’est l’affirmation de la présence vécue de Christ, déjà là, dans nos vies, dans nos moments lumineux et nos nuits intérieures. C’est le moment des vraies questions que nous devrions sans cesse nous poser à nous-mêmes : nous croyons penser juste mais peut-être nous trompons-nous ? Nos certitudes seraient-elles entachées d’erreur ? Car nous sommes incapables de penser « en vérité ». Nos faibles intelligences ne nous permettent pas de voir la lumière que masquent les ténèbres, ni de comprendre le dessein de Dieu. Nos certitudes ne seraient-elles que leurres ? Noël est le moment du dépassement de soi. Dépassement chez Bonhoeffer qui n’est pas le résultat d’un effort intellectuel et volontaire sur soi, ou l’aboutissement d’une philosophie, mais l’accomplissement intérieur d’une vraie liberté, celle que donne la foi. Accomplissement tel qu’un homme qui a tant donné, qui a tant souffert, qui sera pendu dans quelques jours, est capable, dans un raccourci impressionnant, dans une logique suggérée et fulgurante, de déclarer : « Dieu est dans la crèche […] il ne nous arrive rien de mal. »

Noël est « le bon moment » dans l’âme humaine. Mais n’oublions pas ce que prêche aussi Maître Eckhart : « Noël, c’est chaque jour. »

Jean-Paul Sanfourche

mardi 19 décembre 2023

Tartuffe fait ramadan



L'amour qui nous attache aux beautés éternelles
N'étouffe pas en nous l'amour des temporelles…

Molière, Le Tartuffe, acte III, scène III, exergue à : Jack-Alain Léger, Tartuffe fait ramadan, Denoël 2003


« Ali et moi déambulons sous le tablier du métro aérien qui abrite, entre les étals du marché, les bicraves, les petits trafics du trabendo, puis sur ce bout de trottoir du boulevard de la Chapelle où l’on vend à la sauvette toutes sortes de marchandises tombées du camion. Mais nous y retrouvons aussi, entre la rue de la Charbonnière et la rue des Islettes, les habituels dealers de littérature islamique, et surtout islamiste, qui tiennent là, comme si de rien n’était, leur déballé […] : bréviaires de la sagesse musulmane qui sont autant d’appels au djihad, manuels de prière qui enseignent en fait la haine de l’Occident dépravé, guides pratiques pour apprendre à soumettre femmes et enfants, tout cela au milieu d’un tas de saints corans […].

On peut aussi, sans beaucoup fouiller ce vrac de pieux écrits, dénicher des libelles antijuifs tels qu’il s’en publiait avant guerre en France, des pamphlets contre Israël dans lesquels un virulent antisionisme prétendu politique n’est que prétexte à caricatures antisémites comme on en voyait sous l’Occupation, comme on imaginait ingénument ne plus jamais en revoir après la Libération : sous une sanguinolente étoile de David, le youpin adipeux aux paupières lourdes, au nez en busc, aux dents de vampire, aux doigts crochus, et qui brandit un couteau… Et si l’on insiste discrètement, on pourra aussi se procurer le Protocole des Sages de Sion, ce faux forgé par la police secrète tsariste dans le but d’imputer aux Juifs un complot visant à la domination du monde, ce faux grossier [cité dans la charte fondatrice du Hamas (est-ce sans rapport avec le pogrom du 7 octobre ?)] que tant de religieux et de politiciens mais également, hélas, tant d’universitaires, de journalistes et d’écrivains arabes tiennent pour authentique, ce livre qu’on trouve toujours en vente libre au Caire, à Alger, à Damas, à Beyrouth.

Ah, j’oubliais ! ce livre qu’on peut acheter aussi à Paris, et non seulement à Barbès comme je viens de le dire, non seulement à la porte de plusieurs mosquées du quartier de La Chapelle, mais en plein Ve arrondissement, au déballage devant St-Nicolas-du-Chardonnet… Là aussi, il suffit de le demander. »

Jack-Alain Léger, Tartuffe fait ramadan, Denoël 2003, p. 30-32

vendredi 8 décembre 2023

Abnousse Shalmani


"L’islamisme qui est aussi l’islam, qui est son cancer, mais aussi la conséquence de son refus buté de se réformer…" (3 mn 45 — 3 mn 55)

Voir aussi, ICI, à 18 mn 20 sq. les intellectuels français en 1979 et Khomeini…