« D'autres fois, l'oncle attaquait des gens qui s'appelaient "les radicots". Il y avait un M. Comble, qui était un radicot, et sur lequel il était difficile de se faire une opinion : mon père disait que ce radicot était un grand honnête homme, tandis que l'oncle le nommait "la fine fleur de la canaille" et offrait de signer cette déclaration sur papier timbré. Il ajoutait que ce M. Comble était le chef d'une bande de malfaiteurs, qui s'appelaient les "framassons". » (Marcel Pagnol, La Gloire de mon père, 1957)
« Mais ces escarmouches amicales s’arrêtaient là, et jamais on n’abordait le grand sujet, sinon par des allusions discrètes : l’oncle Jules allait à la messe ! Lorsque mon père apprit – par une confidence de tante Rose à ma mère – qu’il communiait deux fois par mois, il en fut positivement consterné, et déclara que "c’était un comble". Ma mère alors le supplia d’admettre cet état de choses, et de renoncer, devant l’oncle, à son petit répertoire de plaisanteries sur les curés, et en particulier, à une chansonnette qui célébrait les exploits aéronautiques du vénérable père Dupanloup.
"Crois-tu qu’il se fâcherait vraiment ?
– Je suis sûre qu’il ne remettrait plus les pieds chez nous, et qu’il défendrait à ma sœur de me fréquenter." Mon père secoua tristement la tête, et soudain, d’une voix furieuse, il s’écria :
"Voilà ! Voilà l'intolérance de ces fanatiques ! Est-ce que je l'empêche, moi, d'aller manger son Dieu tous les dimanches ? Est-ce que je te défends de fréquenter ta sœur parce qu'elle est mariée à un homme qui croit que le Créateur de l'Univers descend en personne, tous les dimanches, dans cent mille gobelets ? Eh bien, je veux lui montrer ma largeur d'esprit. Je le ridiculiserai par mon libéralisme. Non, je ne lui parlerai pas de l'Inquisition, ni de Calas, ni de Jean Huss, ni de tant d'autres que l'Église envoya au bûcher ; je ne dirai rien des papes Borgia, ni de la papesse Jeanne ! Et même s'il essaie de me prêcher les conceptions puériles d'une religion aussi enfantine que les contes de ma grand-mère, je lui répondrai poliment, et je me contenterai d'en rigoler doucement dans ma barbe !" » (Marcel Pagnol, Ibid.)
« Ces anti-cléricaux avaient des âmes de missionnaires. Pour faire échec à "Monsieur le Curé", ils vivaient eux-mêmes comme des saints, et leur morale était aussi inflexible que celles des premiers puritains. » (Marcel Pagnol, Ibid.)
« Mais ces escarmouches amicales s’arrêtaient là, et jamais on n’abordait le grand sujet, sinon par des allusions discrètes : l’oncle Jules allait à la messe ! Lorsque mon père apprit – par une confidence de tante Rose à ma mère – qu’il communiait deux fois par mois, il en fut positivement consterné, et déclara que "c’était un comble". Ma mère alors le supplia d’admettre cet état de choses, et de renoncer, devant l’oncle, à son petit répertoire de plaisanteries sur les curés, et en particulier, à une chansonnette qui célébrait les exploits aéronautiques du vénérable père Dupanloup.
"Crois-tu qu’il se fâcherait vraiment ?
– Je suis sûre qu’il ne remettrait plus les pieds chez nous, et qu’il défendrait à ma sœur de me fréquenter." Mon père secoua tristement la tête, et soudain, d’une voix furieuse, il s’écria :
"Voilà ! Voilà l'intolérance de ces fanatiques ! Est-ce que je l'empêche, moi, d'aller manger son Dieu tous les dimanches ? Est-ce que je te défends de fréquenter ta sœur parce qu'elle est mariée à un homme qui croit que le Créateur de l'Univers descend en personne, tous les dimanches, dans cent mille gobelets ? Eh bien, je veux lui montrer ma largeur d'esprit. Je le ridiculiserai par mon libéralisme. Non, je ne lui parlerai pas de l'Inquisition, ni de Calas, ni de Jean Huss, ni de tant d'autres que l'Église envoya au bûcher ; je ne dirai rien des papes Borgia, ni de la papesse Jeanne ! Et même s'il essaie de me prêcher les conceptions puériles d'une religion aussi enfantine que les contes de ma grand-mère, je lui répondrai poliment, et je me contenterai d'en rigoler doucement dans ma barbe !" » (Marcel Pagnol, Ibid.)
« Ces anti-cléricaux avaient des âmes de missionnaires. Pour faire échec à "Monsieur le Curé", ils vivaient eux-mêmes comme des saints, et leur morale était aussi inflexible que celles des premiers puritains. » (Marcel Pagnol, Ibid.)
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