jeudi 26 octobre 2023

Eumdem salvatorem crucifixisse se speravit


Louis Massignon rapporte ce témoignage :
« Un homme était allé se poster devant al-Hallâj, qui était sur le gibet et avait crié : “Louange à Dieu ! Qui t’a fait exposer là — en exemple aux hommes et aux anges, — en avertissement pour ceux qui regardent !” — Mais voici qu’il sentit par-derrière lui al-Hallâj lui-même, dont la main s'était posée sur son omoplate, — et qui lui récitait (le verset du Qorân sur Jésus) : […]
“Non ils ne l’ont pas tué, ils ne l’ont pas crucifié, mais il leur a paru qu’il en avait été ainsi… et ils ne l’ont pas tué véritablement ; mais Dieu l’a enlevé à Lui, car Dieu est puissant et juste…” […]
Et c’est là le sens de ce qu’une ancienne légende dit d’al-Hallâj en croix : “Il tourna sa face vers la foule et déclara : “celui qui est visible (ici) a sa profession de foi rejetée : celui qui est (ici) invisible a sa profession de foi agréée (par Dieu) !” [Le mot des anciens : ceci est la moitié d'un homme (…) ]. »
(Louis Massignon, “Al-Hallâj le phantasme crucifié des Docètes et Satan selon les Yezidis”, Revue de l'histoire des religions, 1911, in Écrits mémorables, I, coll. Bouquins, Robert Laffont, 2009, p. 505-506)

Massignon réfère aussi à Manès :
« Inimicus quippe, qui eumdem salvatorem judicum patrem crucifixisse se speravit, - ipse est crucifixus , quo tempora aliud ostensum actum est, atque aliud ostensum. » [Trad. : Pour l'ennemi, qui espérait avoir crucifié le même sauveur, le père des juges, — il fut lui-même crucifié, et à cette époque l'acte montré fut accompli, et un autre fut montré.] (Manès, Epistola fundamenti, extrait ap. S. Augustini, De fide contra Manichaeos, XXVIII, PL t. XLIII, 1147 […], in Louis Massignon, ibid., p. 507.)

La proximité d’avec Dieu, terrible en ce monde, est en cela-même signe d’élection, de vie indestructible auprès de Dieu. Témoin à travers les temps, Israël : Christian Jambet : “Le peuple juif, Israël, dépositaire incontestable de l’élection” (in Massignon, ibid. p. viii).

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