"Malheur ! Le temps est proche où l’homme ne mettra plus d’étoile au monde. Malheur ! Les temps sont proches du plus méprisable des hommes, qui ne peut plus se mépriser lui-même.
Voici ! Je vous montre le dernier homme.
‘Amour ? Création ? Désir ? Étoile ? Qu’est cela ?’ — Ainsi demande le dernier homme et il cligne de l’œil.
La terre sera alors devenue plus petite, et sur elle sautillera le dernier homme, qui rapetisse tout. Sa race est indestructible comme celle du puceron ; le dernier homme vit le plus longtemps.
‘Nous avons inventé le bonheur’ — disent les derniers hommes, et ils clignent de l’œil.
Ils ont abandonné les contrées où il était dur de vivre : car on a besoin de chaleur. On aime encore son voisin et l’on se frotte à lui : car on a besoin de chaleur.
Tomber malade et être méfiant passe chez eux pour un péché : on s’avance prudemment. Bien fou qui trébuche encore sur les pierres et sur les hommes !
Un peu de poison de-ci de-là, pour se procurer des rêves agréables. Et beaucoup de poison enfin, pour mourir agréablement." (Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, Prologue § 5)
Simone Weil, Pensées sans ordre sur l’amour de Dieu et autres textes, folio sagesses 2013, p. 23 : “Notre être même, à chaque instant, a pour étoffe, pour substance, l'amour que Dieu nous porte. L'amour créateur de Dieu qui nous tient dans l'existence n'est pas seulement surabondance de générosité. Il est aussi renoncement, sacrifice. Ce n'est pas seulement la Passion, c'est la Création elle-même qui est renoncement et sacrifice de la part de Dieu. La Passion n'en est que l'achèvement. Déjà comme Créateur Dieu se vide de sa divinité. Il prend la forme d'un esclave. Il se soumet à la nécessité. Il s'abaisse. Son amour maintient dans l'existence, dans une existence libre et autonome, des êtres autres que lui, autres que le bien, des êtres médiocres. Par amour il les abandonne au malheur et au péché. Car s'il ne les abandonnait pas, ils ne seraient pas. Sa présence leur ôterait l'être comme la flamme tue un papillon.”
Une réflexion de Simone Weil qui rejoint l’enseignement du judaïsme (que Simone Weil n’a pas reçu) sur le tsimtsoum, le retrait de Dieu pour que la Création advienne : “Dieu commence par se retirer de lui-même, en lui-même. Par cet acte, il laisse au vide une place en son sein. Il se retire […], il crée un espace pour le monde à venir. […] Pour se manifester, il aura fallu qu'au préalable il se retire, qu'il laisse place à un néant à partir duquel la Création est possible.” (Marc-Alain Ouaknin, Tsimtsoum, Introduction à la méditation hébraïque, Albin Michel, 1992, p. 31)
Voir aussi, dans la mystique musulmane, Ahmad Ghazâli, Les intuitions des Fidèles d’amour, trad. Henry Corbin : “Le papillon qui est devenu l’amant de la flamme, a pour nourriture, tant qu’il est encore à distance, la lumière de cette aurore. […] Mais il lui faut continuer de voler jusqu’à ce qu’il la rejoigne. Lorsqu’il y est arrivé, […] c’est lui qui est la nourriture de la flamme. […]”
C’est là « la nostalgie du “Trésor caché” aspirant à être connu [, qui] est le secret de la Création », nous dit Henry Corbin, dans L'imagination créatrice dans le soufisme d'Ibn ‘Arabî, éd. Aubier [1958] 1993, p. 121. Ce trésor caché est la beauté de Dieu, ce secret de la Création, qui habite la quête de cette lignée mystique qui va de Hallaj à Ibn ‘Arabi.
Un enseignement qui donne la Création comme un don de Dieu qui partage sa splendeur. Une Création qui relève d’un don de bonté, comme malgré tout. Dieu s'absente, dans le tsimtsoum, pour que le monde puisse advenir — “s'il n’abandonnait pas les hommes, ils ne seraient pas” (S. Weil). Nous n’adviendrions pas…
Mais “Son amour maintient dans l'existence […] des êtres autres que lui, autres que le bien, des êtres médiocres” (S. Weil).
“Je ne me pardonne pas d’être né. C’est comme si, en m’insinuant dans ce monde, j’avais profané un mystère, trahi quelque engagement de taille, commis une faute d’une gravité sans nom. Cependant il m’arrive d’être moins tranchant : naître m’apparaît alors comme une calamité que je serais inconsolable de n’avoir pas connue.”
(Emil Cioran, De l'inconvénient d'être né, Œuvres p. 1279)
Un malgré tout du “trésor caché” qui se dévoile pour le bien, malgré tout, d’une Création à advenir.
“Quelle est la principale fin de la vie humaine ? demande le premier point du catéchisme de Calvin : C'est de connaître Dieu.
Pourquoi ?
Parce qu'il nous a créés et mis au monde pour être glorifié en nous. Et c'est bien raison que nous rapportions notre vie à sa gloire puisqu'il en est le commencement.
C’est là le souverain bien des hommes.”
Matthieu 13, 44 : “Le Royaume des cieux est comparable à un trésor caché”.
PS : "Mes brebis écoutent ma voix ; je les connais, et elles me suivent." (Jean 10, 27)
Or, quelle est la fin des brebis en ce temps ? Donner leur lait, leur laine, leur viande… par leur mort…
Cela pour entrer dans la vie d'éternité : "Je leur donne la vie éternelle ; et elles ne périront pas pour l'éternité, et personne ne les ravira de ma main." (Jean 10, 28)
“Cette horreur était la vie après la mort et elle nous attendait tous, et pas seulement les malfaisants d'entre nous.
Mon esprit commença à vaciller. Ce fut un soulagement et je faillis m'abandonner. Une idée, cependant, sauva ma santé mentale, une idée à laquelle je continue de me cramponner : la possibilité que ce paysage de cauchemar ne fût lui-même qu'un mirage.
Je m'écriai d'une voix forte : 'Non !'”
(Stephen King, Revival, LdP p. 509-510)
"Or je demande ici quel est l'objet du pur détachement. Je réponds ainsi : ni ceci ni cela n'est l'objet du pur détachement. Il repose sur le néant absolu […]. Pour que le cœur soit disponible au plus élevé, il faut qu'il repose sur le néant […]."
(Maître Eckhart, Du détachement, in Les traités, trad. J. Ancelet-Hustache, Points p. 185)
"Si l'on approfondit un peu le rapport Pie XII-Hitler on peut faire des découvertes intéressantes. Il y a là comme une symétrie et une complémentarité. L'appel général du pape au Bien et à la paix n'est que du vide exhibé et c'est de ce vide qu'a précisément besoin l'Hitléro-Satan pour étendre l'empire de ses drapeaux et opérer tranquillement au milieu des nations catholiques. Le giron du pastor angelicus accueille sans apparat nuptial, dans une ombre clandestine, feignant toujours l'insémination du Verbe d'en haut, le verbe inférieur auquel il rend le service inestimable du silence, tandis que sa bouche dénonce le Mal comme s'il était sine nomine et n'avait pas réellement ces sinistres enseignes. Il se greffe ici un drame formidable, propre aux clairs-obscurs historiques, qui complique tout le pape donne exclusivement au Mal le nom de matérialisme dialectique, et sans comprendre (ou sans vouloir comprendre) l'antireligion hitlérienne peinte en Providence dégouttante de sang, parce qu'il voit dans l'hitlérisme l'antithèse historique de la révolution bolchevique et de la venue du communisme il tend aussitôt à le favoriser comme un bon chien de garde à la puissante mâchoire, doté peut-être d'une paire d'ailes chérubiniques : il n'a pas la capacité, la force de voir la présence du Mal dans l'une et l'autre monstruosités qu'il est appelé à juger, ni de les désigner toutes deux d'un seul geste de ses deux longues mains : voici, messieurs, le Mal. C'est un aveuglement si grave qu'il mérite le nom d'impiété : dans de tels cas, l'homme médiocre placé dans un poste aussi élevé est le signe que Dieu veut nous détruire, et c'est justement que la réprobation corrode sa mémoire. Parce que le pape fait, dans son cœur, un triste, un horrible choix du coup tout son prestige de grand chef religieux est précipité dans l'entonnoir de mort planté dans le baril hitlérien, malgré ses fuites dans des réserves éperdues et des précautions verbales superflues. […] Ainsi son anathème (modeste, au fond, comme désormais tout ce qui vient du pape) est-il lancé sur une seule des deux faces monstrueuses, et sur celle où elle tombe avec le moins d'efficacité, tandis que l'autre en pleine fête, ivre de carnages, comme un Gilles de Rais à Machecoul éclabousse tout, sans bâillon, de sa salive infernale."
(Guido Ceronetti, Le silence du corps [1979], trad. André Maugé, LdP 1984 p. 188-189)
"Dis désormais que l'Église de Rome,
Pour avoir voulu fondre en soi les deux pouvoirs,
Dans la fange est tombée et souille elle et sa charge."
(Dante Alighieri, La divine comédie - "Purgatoire", Chant XVI, 127-129)
Gregorio Allegri - Miserere mei Deus Psaume 51 (mis en musique par Allegri pour la première fois vers 1630).
[1 Au chef des chantres. Psaume de David.
2 Lorsque Nathan, le prophète, vint à lui, après que David fut allé vers Bath-Schéba.]
3 Ô Dieu ! aie pitié de moi dans ta bonté ; Selon ta grande miséricorde, efface mes transgressions ;
4 Lave-moi complètement de mon iniquité, Et purifie-moi de mon péché.
5 Car je reconnais mes transgressions, Et mon péché est constamment devant moi.
6 J’ai péché contre toi seul, Et j’ai fait ce qui est mal à tes yeux, En sorte que tu seras juste dans ta sentence, Sans reproche dans ton jugement.
7 Voici, je suis né dans l’iniquité, Et ma mère m’a conçu dans le péché.
8 Mais tu veux que la vérité soit au fond du cœur : Fais donc pénétrer la sagesse au-dedans de moi !
9 Purifie-moi avec l’hysope, et je serai pur ; Lave-moi, et je serai plus blanc que la neige.
10 Annonce-moi l’allégresse et la joie, Et les os que tu as brisés se réjouiront.
11 Détourne ton regard de mes péchés, Efface toutes mes iniquités.
12 Ô Dieu ! crée en moi un cœur pur, Renouvelle en moi un esprit bien disposé.
13 Ne me rejette pas loin de ta face, Ne me retire pas ton Esprit saint.
14 Rends-moi la joie de ton salut, Et qu’un esprit de bonne volonté me soutienne !
15 J’enseignerai tes voies à ceux qui les transgressent, Et les pécheurs reviendront à toi.
16 Ô Dieu, Dieu de mon salut ! délivre-moi du sang versé, Et ma langue célébrera ta miséricorde.
17 Seigneur ! ouvre mes lèvres, Et ma bouche publiera ta louange.
18 Si tu avais voulu des sacrifices, je t’en aurais offert ; Mais tu ne prends point plaisir aux holocaustes.
19 Les sacrifices qui sont agréables à Dieu, c’est un esprit brisé : Ô Dieu ! tu ne dédaignes pas un cœur brisé et contrit.
20 Répands par ta grâce tes bienfaits sur Sion, Bâtis les murs de Jérusalem !
21 Alors tu agréeras des sacrifices de justice, Des holocaustes et des victimes tout entières ; Alors on offrira des taureaux sur ton autel.
Texte chanté : Vulgate (Ps 50)
[1 in finem psalmus David
2 cum venit ad eum Nathan propheta quando intravit ad Bethsabee]
3 miserere mei Deus secundum magnam; misericordiam tuam et; secundum multitudinem miserationum tuarum dele iniquitatem meam
4 amplius lava me ab iniquitate mea et a peccato meo munda me
5 quoniam iniquitatem meam ego cognosco et peccatum meum contra me est semper
6 tibi soli peccavi et malum coram te feci ut iustificeris in sermonibus tuis et vincas cum iudicaris
7 ecce enim in iniquitatibus conceptus sum et in peccatis concepit me mater mea
8 ecce enim veritatem dilexisti incerta et occulta sapientiae tuae manifestasti mihi
9 asparges me hysopo et mundabor lavabis me et super nivem dealbabor
10 auditui meo dabis gaudium et laetitiam exultabunt ossa humiliata
11 averte faciem tuam a peccatis meis et omnes iniquitates meas dele
12 cor mundum crea in me Deus et spiritum rectum innova in visceribus meis
13 ne proicias me a facie tua et spiritum sanctum tuum ne auferas a me
14 redde mihi laetitiam salutaris tui et spiritu principali confirma me
15 docebo iniquos vias tuas et impii ad te convertentur
16 libera me de sanguinibus Deus Deus salutis meae exultabit lingua mea iustitiam tuam
17 Domine labia mea aperies et os meum adnuntiabit laudem tuam
18 quoniam si voluisses sacrificium dedissem utique holocaustis non delectaberis
19 sacrificium Deo spiritus contribulatus cor contritum et humiliatum Deus non spernet
20 benigne fac Domine in bona voluntate tua Sion et aedificentur muri Hierusalem
21 tunc acceptabis sacrificium iustitiae oblationes et holocausta tunc inponent super altare tuum vitulos
"La question que je pose au RN et à d’autres, est la suivante : à partir de combien dans les sondages on estime être au-dessus des lois ? Marine Le Pen a toujours demandé une justice ferme…" (Prisca Thevenot)