« L’histoire est écrite par les vainqueurs. Tout ce que nous savons des peuples assassinés est ce que les assassins ont voulu en dire. Si nos ennemis remportent la victoire, si ce sont eux qui écrivent l’histoire de cette guerre, ils peuvent aussi décider de nous gommer complètement de la mémoire du monde, comme si nous n'avions jamais existé. »
(William Karel, La diaspora des cendres)
vendredi 16 décembre 2022
jeudi 15 décembre 2022
Cathares
Pour mieux comprendre le christianisme cathare,
le dernier livre d'Anne Brenon est paru…
Parmi les apports précieux de son livre, un travail sur les termes “cathares”, “hérésie”, “dissidence”, “bons hommes” et “bonnes dames”, autant de termes, parmi d’autres, qui, mal définis, nourrissent une polémique au fond assez stérile depuis deux décennies pour la dernière forme de cette polémique.
(L’ex-cathare Rainier Sacconi ne liste pas la Genèse avec d’autres livres de l’Ancien Testament lus par les cathares, note Anne Brenon — p. 62 et p. 108. Cette absence de mention ne doit pas faire induire, comme par défaut, un rejet du livre par les cathares, mais plutôt, comme pour toute la Bible, Nouveau Testament inclus, un rejet de la dimension historique, charnelle, perçue comme diabolique, au profit du sens spirituel des textes. Il s'agit d'un rejet de l'histoire, qui est celle d'un monde mauvais, déchu, concernant tous les livres bibliques, ceux du NT comme ceux de l'AT, et donc de la Genèse comme origine de ce monde mauvais. Reste, y compris pour la Genèse, la symbolique du monde céleste. Le prologue de Jean est l'exposé de cette symbolique de la Genèse.)
le dernier livre d'Anne Brenon est paru…
Parmi les apports précieux de son livre, un travail sur les termes “cathares”, “hérésie”, “dissidence”, “bons hommes” et “bonnes dames”, autant de termes, parmi d’autres, qui, mal définis, nourrissent une polémique au fond assez stérile depuis deux décennies pour la dernière forme de cette polémique.
(L’ex-cathare Rainier Sacconi ne liste pas la Genèse avec d’autres livres de l’Ancien Testament lus par les cathares, note Anne Brenon — p. 62 et p. 108. Cette absence de mention ne doit pas faire induire, comme par défaut, un rejet du livre par les cathares, mais plutôt, comme pour toute la Bible, Nouveau Testament inclus, un rejet de la dimension historique, charnelle, perçue comme diabolique, au profit du sens spirituel des textes. Il s'agit d'un rejet de l'histoire, qui est celle d'un monde mauvais, déchu, concernant tous les livres bibliques, ceux du NT comme ceux de l'AT, et donc de la Genèse comme origine de ce monde mauvais. Reste, y compris pour la Genèse, la symbolique du monde céleste. Le prologue de Jean est l'exposé de cette symbolique de la Genèse.)
vendredi 9 décembre 2022
"You reached for the secret too soon"
Pink Floyd - Shine On You Crazy Diamond
Remember when you were young, You shone like the sun Shine on you crazy diamond Now there's a look in your eyes, Like black holes in the sky.
Shine on you crazy diamond You were caught on the crossfire Of childhood and stardom, Blown on the steel breeze Come on you target for faraway laughter, Come on you stranger, you legend, you martyr, and shine ! |
You reached for the secret too soon, You cried for the moon Shine on you crazy diamond Threatened by shadows at night, And exposed in the light.
Shine on you crazy diamond Well you wore out your welcome With random precision, Rode on the steel breeze Come on you raver, you seer of visions, Come on you painter, you piper, you prisoner, and shine ! |
dimanche 4 décembre 2022
Le Christ aux coquelicots
"Vivre, c'est construire une cérémonie inoubliable avec rien."
Christian Bobin, Pierre, (hommage à Pierre Soulages)
Christian Bobin, Le Christ aux coquelicots, texte lu par Julie Dratwiak
Musique : Ólafur Arnalds
"C'est la vanité qui fait les livres. C'est si beau que tu n'aies jamais rien écrit. […]
C'est une nourriture d'anges que ta parole. Même les plus beaux livres ne changent pas les gens. Ils ne changent que leur auteur."
Christian Bobin, Pierre, (hommage à Pierre Soulages)
Christian Bobin, Le Christ aux coquelicots, texte lu par Julie Dratwiak
Musique : Ólafur Arnalds
C'est une nourriture d'anges que ta parole. Même les plus beaux livres ne changent pas les gens. Ils ne changent que leur auteur."
samedi 26 novembre 2022
Tragique nature, naturelle violence
« Jeune encore, lorsque je commençais à m'intéresser à l'histoire naturelle, j'ai rencontré en Normandie un malheureux crapaud, dont le visage, la face était partiellement détruite par la croissance d'une larve de diptère. Certaines pondent dans les fosses nasale des crapauds ; la larve, en se développant, détruit une partie de la tête de ce malheureux animal. Songeons aussi aux parasites ! Les apologistes n'y pensaient pas. Ils ne savaient peut-être pas qu'il en existait. Or, les parasites composent un monde incroyable. Il s'en trouve partout. Il n'est pas une espèce animale qui ne connaisse ses parasites externes ou internes. Ces derniers peuvent causer des ravages physiques considérables, provoquant des souffrances qui ne le sont pas moins. Imaginer que tout provient de la volonté d'un Dieu miséricordieux, compatissant à l'égard de ses créatures, voilà qui paraît difficile à admettre, quand on contemple la vérité physique de l'affreux spectacle de la nature. Pour aborder de tels problèmes, peut-être faudrait-il posséder des connaissances, dont ne disposent pas la plupart d'entre nous. »
(Théodore Monod, Terre et Ciel, p. 238)
dimanche 20 novembre 2022
Fruits de la grâce...
« Pourquoi prêcher encore la Loi puisque l'homme [est] justifié par la foi et que son destin [est] scellé "de toute éternité" ?
« Les théologiens puritains […] loin d'encourager l'accumulation des richesses, ils en prônèrent le développement pour le bien de la société, et encouragèrent à la vie frugale. Ils s'efforcèrent en vérité contre le dogme de la prédestination, non à cause de ce dogme, de fonder une éthique de l'effort et de la rigueur » [… à l'encontre de la théorie de Max Weber]. (Liliane Crété, Les puritains, quel héritage aujourd'hui ?, Olivétan 2012, p. 54 et 57-58)
jeudi 17 novembre 2022
Il pleut, il fait soleil...
Le dicton "il pleut, il fait soleil, le diable bat sa femme et il marie sa fille", a pour fondement une tradition mythologique rapportée d’après un fragment de Plutarque qu’Eusèbe de Césarée nous a conservé dans sa Préparation évangélique (liv. III, ch. 1). Jupiter (grec Zeus) était brouillé avec Junon (gr. Héra) qui se tenait cachée sur le mont Cythéron. Errant dans le voisinage, le dieu rencontra le sculpteur Alalcomène qui lui dit que, pour la ramener, il fallait la tromper et feindre de se marier avec une autre. Jupiter trouva le conseil fort bon et voulut le mettre sur l’heure en pratique.
Aidé d’Alalcomène il coupa un grand chêne, forma du tronc de cet arbre la statue d’une belle femme, lui donna le nom de Dédala, et l’orna de la brillante parure de l’hyménée. Après cela, le chant nuptial fut entonné, et des joueurs de flûte, que fournit la Béotie, l’accompagnèrent du son de leurs instruments.
Junon instruite de ces préparatifs descendit à pas précipités du mont Cythéron, vint trouver Jupiter, se livra à des transports de jalousie et de colère, et fondit sur sa rivale pour la maltraiter ; mais ayant reconnu la supercherie, elle changea ses cris en éclats de rire, se réconcilia avec son époux, se mit joyeusement à la tête de la noce qu’elle voulut voir achever, et institua, en mémoire de l’événement, la fête des dédales ou des statues qu’on célébra depuis, tous les ans, en grande pompe, à Platée en Béotie.
La dispute de Jupiter et de Junon est, selon Plutarque / Eusèbe, une allégorie de la lutte du principe igné représenté par Zeus / Jupiter, et du principe humide représenté par Héra / Junon. Lorsque ces deux principes, ne se tempérant pas l’un par l’autre, ont rompu l’harmonie qui doit régner entre eux, il y a trouble et désordre dans les régions atmosphériques. La domination du premier produit une sécheresse brûlante, et celle du second amène des torrents de pluie.
Ce dernier accident survint sans doute dans la Béotie qui fut inondée, ainsi que l’indique le séjour de Junon sur le Cythéron ; et lorsque la terre dégagée des eaux eût reparu, on dit que la sérénité rendue à l’air par le calme était l’effet de la réconciliation des deux divinités, comme le mauvais temps avait été l’effet de leur division.
Après cette explication, il est presque superflu d’ajouter que Jupiter qui triomphe du courroux de Junon, ou, suivant l’expression de Plutarque, le principe igné qui se montre plus fort que le principe humide, est le diable qui bat sa femme, qui l’emporte sur sa femme, tandis que le même dieu qui fait la noce de la statue, dont il est l’auteur ou le père, est le diable qui marie (épouse) sa fille. On sait que Jupiter a reçu le nom de diable et de grand diable dans le langage des chrétiens.
Fille (comme cause de la brouille plutôt que remède à la brouille ?) : l'arbre d'Alalcomène, ou : Sémélé (gr. étymologie chtonienne), fille d'Harmonie, fille d'Arès (lat. Mars) et d'Aphrodite (lat. Venus), Aphrodite / Venus fille de Zeus selon Homère (mais fille d'Ouranos, donc tante de Zeus selon Hésiode) — Sémélé, donc, fille de Venus, et de Cadmos, roi-fondateur légendaire de la cité de Thèbes, est amante de Zeus / Jupiter. Héra / Junon, jalouse, emprunta les traits de Béroé, la nourrice de Sémélé, et conseilla à sa rivale de demander à Zeus de lui montrer son vrai visage. Épouvanté, mais n'osant refuser car il lui avait promis de lui accorder tout ce qu'elle désirerait, Zeus se présenta donc devant elle avec sa foudre et ses éclairs : celle-ci, ne supportant pas la vue des éclairs, brûla.
Sémélé ou, autre hypothèse, Latone (gr. Léto) — selon Plutarque / Eusèbe : "les partisans du sens figuré trouvent à celle-ci une explication moins obscène [qu'amante de Zeus] et plus conforme à la nature. Ils font de Junon et de Latone une seule et même chose : et voici de quelle manière. Junon est la terre comme nous l'avons déjà vu. Latone est la nuit parce que la nuit produit l'oubli (léthô) dans ceux qui se livrent au sommeil : or, la nuit n'est autre chose que l'ombre de la terre. Car lorsque la terre arrive vers le couchant, elle nous dérobe le soleil, et par l'interposition de sa masse elle produit l'obscurité. C'est elle aussi qui opère la décroissance de la pleine lune ; parce qu'à mesure que la lune tourne, l'ombre de la terre se projette sur sa lumière et finit par la faire disparaître entièrement." D'où possiblement ("moins obcène"), l'arbre d'Alalcomène, "fille" de Zeus…
Aidé d’Alalcomène il coupa un grand chêne, forma du tronc de cet arbre la statue d’une belle femme, lui donna le nom de Dédala, et l’orna de la brillante parure de l’hyménée. Après cela, le chant nuptial fut entonné, et des joueurs de flûte, que fournit la Béotie, l’accompagnèrent du son de leurs instruments.
Junon instruite de ces préparatifs descendit à pas précipités du mont Cythéron, vint trouver Jupiter, se livra à des transports de jalousie et de colère, et fondit sur sa rivale pour la maltraiter ; mais ayant reconnu la supercherie, elle changea ses cris en éclats de rire, se réconcilia avec son époux, se mit joyeusement à la tête de la noce qu’elle voulut voir achever, et institua, en mémoire de l’événement, la fête des dédales ou des statues qu’on célébra depuis, tous les ans, en grande pompe, à Platée en Béotie.
La dispute de Jupiter et de Junon est, selon Plutarque / Eusèbe, une allégorie de la lutte du principe igné représenté par Zeus / Jupiter, et du principe humide représenté par Héra / Junon. Lorsque ces deux principes, ne se tempérant pas l’un par l’autre, ont rompu l’harmonie qui doit régner entre eux, il y a trouble et désordre dans les régions atmosphériques. La domination du premier produit une sécheresse brûlante, et celle du second amène des torrents de pluie.
Ce dernier accident survint sans doute dans la Béotie qui fut inondée, ainsi que l’indique le séjour de Junon sur le Cythéron ; et lorsque la terre dégagée des eaux eût reparu, on dit que la sérénité rendue à l’air par le calme était l’effet de la réconciliation des deux divinités, comme le mauvais temps avait été l’effet de leur division.
Après cette explication, il est presque superflu d’ajouter que Jupiter qui triomphe du courroux de Junon, ou, suivant l’expression de Plutarque, le principe igné qui se montre plus fort que le principe humide, est le diable qui bat sa femme, qui l’emporte sur sa femme, tandis que le même dieu qui fait la noce de la statue, dont il est l’auteur ou le père, est le diable qui marie (épouse) sa fille. On sait que Jupiter a reçu le nom de diable et de grand diable dans le langage des chrétiens.
Fille (comme cause de la brouille plutôt que remède à la brouille ?) : l'arbre d'Alalcomène, ou : Sémélé (gr. étymologie chtonienne), fille d'Harmonie, fille d'Arès (lat. Mars) et d'Aphrodite (lat. Venus), Aphrodite / Venus fille de Zeus selon Homère (mais fille d'Ouranos, donc tante de Zeus selon Hésiode) — Sémélé, donc, fille de Venus, et de Cadmos, roi-fondateur légendaire de la cité de Thèbes, est amante de Zeus / Jupiter. Héra / Junon, jalouse, emprunta les traits de Béroé, la nourrice de Sémélé, et conseilla à sa rivale de demander à Zeus de lui montrer son vrai visage. Épouvanté, mais n'osant refuser car il lui avait promis de lui accorder tout ce qu'elle désirerait, Zeus se présenta donc devant elle avec sa foudre et ses éclairs : celle-ci, ne supportant pas la vue des éclairs, brûla.
Sémélé ou, autre hypothèse, Latone (gr. Léto) — selon Plutarque / Eusèbe : "les partisans du sens figuré trouvent à celle-ci une explication moins obscène [qu'amante de Zeus] et plus conforme à la nature. Ils font de Junon et de Latone une seule et même chose : et voici de quelle manière. Junon est la terre comme nous l'avons déjà vu. Latone est la nuit parce que la nuit produit l'oubli (léthô) dans ceux qui se livrent au sommeil : or, la nuit n'est autre chose que l'ombre de la terre. Car lorsque la terre arrive vers le couchant, elle nous dérobe le soleil, et par l'interposition de sa masse elle produit l'obscurité. C'est elle aussi qui opère la décroissance de la pleine lune ; parce qu'à mesure que la lune tourne, l'ombre de la terre se projette sur sa lumière et finit par la faire disparaître entièrement." D'où possiblement ("moins obcène"), l'arbre d'Alalcomène, "fille" de Zeus…
dimanche 13 novembre 2022
samedi 5 novembre 2022
Ministère de victime consentante
« Si j’avais su au début, quand j’ai commencé d’écrire, ce que j’ai maintenant éprouvé et vu, à savoir à quel point les gens haïssent la Parole de Dieu et s’y opposent aussi violemment, je m’en serais tenu en vérité au silence (…) Mais Dieu m’a poussé de l’avant comme une mule à qui l’on aurait bandé les yeux pour qu’elle ne voie pas ceux qui accourent contre elle (…) C’est ainsi que j’ai été poussé en dépit de moi au ministère d’enseignement et de prédication ; mais si j’avais su ce que je sais maintenant, c’est à peine si dix chevaux auraient pu m’y pousser. C’est ainsi que se plaignent aussi Moïse et Jérémie d’avoir été trompés. » (Luther, Propos de table (cité par Volz dans son commentaire de Jérémie, p. 208, in Henry Mottu, Les "confessions" de Jérémie : une protestation contre la souffrance, Labor & Fides, 1985, p. 123)
« L'ambassadeur, dans l'administration des sacrements, comme dans ses autres offices, représente le Maître qui l'envoie. En parlant des pasteurs, Calvin écrit : “Et quand il a commandé à ses disciples de faire, en célébrant la cène, ce qu'il avait fait, il les a sans doute voulu instruire qu'à son exemple il y en eût un qui dispensat le sacrement aux autres (Mat. 28: 19; Luc. 22:19).” L'ambassadeur fait ce que son Maître avait fait. » (in Léopold Schümmer, Le ministère pastoral dans l'Institution chrétienne de Calvin à la lumière du troisième sacrement, Wiesbaden, 1965, p. 59)
Nous qui avons reçu l'ordination de reconnaissance de notre ministère, nous dont la vocation interne au ministère pastoral a été marquée comme vocation externe, nous avons été admis dans le triple ministère du Souverain Pasteur (1 P 5, 4) — royal (Lc 22, 25-26), prophétique (Jr 20, 7-8), sacerdotal (Hé 5, 8). Quant à la dimension royale, elle consiste en service (i.e. “ministère”) selon le Christ (“qu’il n’en soit pas parmi vous comme parmi les rois des nations”). Quant à la dimension prophétique, elle consiste à dire une parole qui peut déplaire, et nous rendre déplaisants (“tout le monde se moque de moi”, Jr 20, 7). Quant à la dimension sacerdotale, je ne me souviens pas qu'un pasteur ait jamais dit : "J'ai été ordonné victime", ou : "J'étudie pour être victime". Cela semblerait presque étranger au fait d'être pasteur. Les instituts de formation au ministère nous ont enseigné d'être de “bons” pasteurs ; mais on ne nous a pas dit d'être des victimes consentantes. Et pourtant, le Christ, le Souverain Pasteur, n'était-il pas une victime ? N'est-il pas venu pour mourir ? Il n'a offert ni agneau, ni taureau, ni colombes ; il n'a rien offert d'autre que lui-même… Célébrons-nous la sainte Cène, annonçant la mort Seigneur (1 Co 11, 26) pour le péché (2 Co 5, 21), comme si cela n'avait aucun lien avec nous ? Présentons-nous le Christ Sauveur en présence du Père comme si nous n'étions pas en train de mourir avec lui ? (Adapté de Fulton Sheen)
mercredi 26 octobre 2022
Le mal, le hasard et le Dieu de lumière
Photo de J.-L. Gasc : « cité de Carcassonne, en mémoire de René Nelli »
Réflexions de René Nelli sur le mal, le hasard et le Dieu "en qui il n'y a point de ténèbres" (1 Jn 1, 5)
Source : FB de Michel Jas
René Nelli en 1970 : Journal spirituel d’un cathare d’aujourd’hui
R. Nelli : « Le manichéisme est la (seule) religion qui a osé faire une place privilégiée (…) au hasard parfait, au chaos, à l’absence absolue d’intelligibilité et par conséquent, au Mal qui, s’il était tant soi peu intelligible, ne serait pas le Mal. A tout cela il a donné un principe obscur, mais éternel, obligeant ainsi le vrai Dieu à quitter ce monde pour devenir transcendant. C’est par hasard, disent les mythes manichéens, que les ténèbres sont entrées en contact avec la lumière et qu’elles l’ont partiellement dévorée. L’organisation de l’univers a eu pour point de départ une aventure contingente, que rien ne peut expliquer, au cours de laquelle le Hasard s’est révélé opposé à l’Ordre, sans réussir cependant à le ruiner absolument. Il n’a abouti qu’à forcer l’anti-hasard à manifester sa Toute-présence » p.79
« Le manichéisme n’est pas un dithéisme, mais un athéisme juxtaposé à un théisme. Pour lui, le hasard, bien qu’il ne puisse pas s’imposer de façon absolue à toute manifestation, en raison de la présence de l’anti-hasard, fait sentir ses effets sur la totalité de se qui existe, et cela, éternellement –ou plutôt indéfiniment – et il parvient même à construire des structures relativement stables, à édifier un semblant d’ordre, grâce à l’indéfini où il se meut et à la durée toujours renaissante et toujours reconduite où il exerce son activité sans cause. » p. 84-85
« On sait que le dualisme manichéen n’oppose pas seulement le Hasard à l’Anti-hasard, mais aussi le chaos à la structure, la contingence à la nécessité, la ‘matière’ (ce que nous ne pouvons saisir, telle qu’elle est ou n’est pas, ni par les sens ni par la pensée , puisqu’elle est recréation perpétuelle, commencement absolu, et dans son devenir, négation de toute cause) à l’esprit ; le temps enfin, à l’Eternité. A tous les degrés de l’Apparition, on trouve ce même déchirement de l’être, cet antagonisme de l’être et du néant. ‘Geste, parole, existence, écrivait Joë Bousquet, toute présence s’associe son absence, et sa manifestation est au prix de cette contradiction.’ » p. 86
« Pour Mani (qui s’inspirait d’ailleurs de Platon), le Mal ‘aimant le désordre et la difformité, résulte d’un principe aveugle inhérent à la matière informe (…) Deux natures irréductibles l’une à l’autre… » p.87
… Un temps des temps et la moitié d'un temps…
lundi 17 octobre 2022
Chute de l'esprit (2)
« Une chrétienté prêchant l'amour du prochain n'a pourtant pas protesté immédiatement contre l'esclavage, la torture, les procès en sorcellerie, toutes sortes d'atrocités qu'elle a non seulement cautionnées, mais commises. […] "Ce souvenir devrait […] défendre à jamais [le christianisme] de toute arrogance […]". » (Laurent Gagnebin, Albert Schweitzer, DDB, 1999, p. 113 - cit. Schweitzer, Ma vie et ma pensée, Albin Michel, 1966, p. 261)
« Quant à nous, nous avons abandonné l’illusion que la religion vivante puisse découler logiquement de la connaissance du monde. Nous avons la certitude que le monde ne peut amener à la connaissance de Dieu, qui est personnalité morale. Nous regardons en face la terrible énigme que le monde représente pour nous et nous luttons pour ne point douter de Dieu. Nous osons avouer que les forces agissant dans le monde sont à bien des égards fort différentes de celles que nous attendrions de la part d’un Créateur bon et parfait. Nous osons avouer que maints aspects de la nature et de nous-mêmes s’imposent à nous comme quelque chose de mauvais. Nous sommes […] profondément conscients que Dieu ne peut être saisi par l’intelligence, mais bien par la foi qui dit : "malgré tout, je m’attache à toi”. » (Albert Schweitzer, Les religions mondiales et le christianisme, L’Âge d’Homme, 1975, p. 48-49)
« Quant à nous, nous avons abandonné l’illusion que la religion vivante puisse découler logiquement de la connaissance du monde. Nous avons la certitude que le monde ne peut amener à la connaissance de Dieu, qui est personnalité morale. Nous regardons en face la terrible énigme que le monde représente pour nous et nous luttons pour ne point douter de Dieu. Nous osons avouer que les forces agissant dans le monde sont à bien des égards fort différentes de celles que nous attendrions de la part d’un Créateur bon et parfait. Nous osons avouer que maints aspects de la nature et de nous-mêmes s’imposent à nous comme quelque chose de mauvais. Nous sommes […] profondément conscients que Dieu ne peut être saisi par l’intelligence, mais bien par la foi qui dit : "malgré tout, je m’attache à toi”. » (Albert Schweitzer, Les religions mondiales et le christianisme, L’Âge d’Homme, 1975, p. 48-49)
samedi 15 octobre 2022
Chute de… l'esprit
Albert Schweitzer : « Lorsque nous pardonnons à nos ennemis, nous nous glorifions de notre grandeur d'âme ; quand nous rendons service à celui qui a besoin de nous, nous admirons notre générosité. » (Vivre, Albin Michel, 1995, p. 162)
« Dans sa lecture critique de la civilisation, on peut repérer cinq traits principaux caractérisant, d'après [Schweitzer], sa faillite.
Premièrement, l'asservissement de l'homme moderne qui se trouve victime d'une tragique aliénation et qui ne connaît plus de véritable indépendance personnelle […].
Deuxièmement, le surmenage, où le travail est vu sous l'angle du seul rendement, interdisant tout recueillement et toute concentration de l'esprit.
Troisièmement, une spécialisation à outrance avec des êtres humains morcelés, en quelque sorte, divisés en eux-mêmes et cloisonnés, dont, dans le respect total de la personne, on ne promeut pas l'élan créateur et artistique.
Quatrièmement, une déshumanisation de l'être humain de plus en plus gagné par l'indifférence aux autres, une sorte de froideur, d'insensibilité, de perte de l'esprit humanitaire.
Cinquièmement, enfin, une organisation, qui nous domine et nous échappe, de la société avec le règne totalitaire de l'administration, des intérêts économiques, du collectif : “Autrefois la société portait les individus, aujourd'hui elle les écrase.” » (Laurent Gagnebin, Albert Schweitzer, DDB, 1999, p. 69-70 - cit. Schweitzer, La civilisation et l'éthique, Colmar, 1976, p. 52)
« Quelle est la cause d'une telle situation ? Schweitzer ne se lasse pas de le démontrer et de le répéter : il s'agit d'un vide, d'un refus, d'une perte, d'une chute de… l'esprit. » (Gagnebin, ibid., p. 70)
« Dans sa lecture critique de la civilisation, on peut repérer cinq traits principaux caractérisant, d'après [Schweitzer], sa faillite.
Premièrement, l'asservissement de l'homme moderne qui se trouve victime d'une tragique aliénation et qui ne connaît plus de véritable indépendance personnelle […].
Deuxièmement, le surmenage, où le travail est vu sous l'angle du seul rendement, interdisant tout recueillement et toute concentration de l'esprit.
Troisièmement, une spécialisation à outrance avec des êtres humains morcelés, en quelque sorte, divisés en eux-mêmes et cloisonnés, dont, dans le respect total de la personne, on ne promeut pas l'élan créateur et artistique.
Quatrièmement, une déshumanisation de l'être humain de plus en plus gagné par l'indifférence aux autres, une sorte de froideur, d'insensibilité, de perte de l'esprit humanitaire.
Cinquièmement, enfin, une organisation, qui nous domine et nous échappe, de la société avec le règne totalitaire de l'administration, des intérêts économiques, du collectif : “Autrefois la société portait les individus, aujourd'hui elle les écrase.” » (Laurent Gagnebin, Albert Schweitzer, DDB, 1999, p. 69-70 - cit. Schweitzer, La civilisation et l'éthique, Colmar, 1976, p. 52)
« Quelle est la cause d'une telle situation ? Schweitzer ne se lasse pas de le démontrer et de le répéter : il s'agit d'un vide, d'un refus, d'une perte, d'une chute de… l'esprit. » (Gagnebin, ibid., p. 70)
jeudi 6 octobre 2022
dimanche 25 septembre 2022
mercredi 3 août 2022
Patriarcat pour tous ?
« La GPA opère un “renversement des principes du droit qui ne dit pas son nom (‘novdroit’)” en méconnaissant l’article 56 du code civil selon lequel “la mère est celle qui accouche" » (Nathalie Heinich, Préface à Les marchés de la maternité, éd. O. Jacob, p. 11).
Cette affirmation de l'article 56 du code civil ouvre, ouvrait jusque là, sur une heureuse potentielle remise en cause du système patriarcal — système renforcé depuis, dans un apparent paradoxe, par le ”mariage pour tous” !
Jusque là : « "Le cœur du mariage, ce n'est pas le couple mais la présomption de paternité", disait Jean Carbonnier, le grand réformateur du droit de la famille » — ainsi que le rappelle Irène Théry ("Le mariage n'est plus le socle de la famille", JDD 2012/2017). Ce n’est plus le cas désormais, admet-elle (ibid.). Le "mariage pour tous” a rendu caduque cette conception du mariage, liée à ce que la mère est celle qui accouche — le père étant celui qui est présumé tel en tant qu’époux de la mère (ou qui reconnaît l'enfant de la mère).
Voilà qui est (était) potentiellement matrilinéaire, condition pour un dépassement, jamais arrivé jusque là, du système patriarcal — système désormais renforcé suite au "mariage pour tous", puis, à présent, doublement renforcé par la GPA, qui de facto, abolit la mère comme celle qui accouche, au profit de la “mère d’intention”, ou du (des) “père(s) d’intention”.
Cette affirmation de l'article 56 du code civil ouvre, ouvrait jusque là, sur une heureuse potentielle remise en cause du système patriarcal — système renforcé depuis, dans un apparent paradoxe, par le ”mariage pour tous” !
Jusque là : « "Le cœur du mariage, ce n'est pas le couple mais la présomption de paternité", disait Jean Carbonnier, le grand réformateur du droit de la famille » — ainsi que le rappelle Irène Théry ("Le mariage n'est plus le socle de la famille", JDD 2012/2017). Ce n’est plus le cas désormais, admet-elle (ibid.). Le "mariage pour tous” a rendu caduque cette conception du mariage, liée à ce que la mère est celle qui accouche — le père étant celui qui est présumé tel en tant qu’époux de la mère (ou qui reconnaît l'enfant de la mère).
Voilà qui est (était) potentiellement matrilinéaire, condition pour un dépassement, jamais arrivé jusque là, du système patriarcal — système désormais renforcé suite au "mariage pour tous", puis, à présent, doublement renforcé par la GPA, qui de facto, abolit la mère comme celle qui accouche, au profit de la “mère d’intention”, ou du (des) “père(s) d’intention”.
dimanche 31 juillet 2022
Platonisme dévoyé
« Le discours de l’anthropologie occidentale est souvent qualifié de dualiste parce qu’il attribue à l’homme une double nature : psychique et somatique, spirituelle et charnelle. Mais ces deux dimensions de l’homme n’ont jamais été conçues comme réellement séparables, sauf par la mort. L’essentiel de la question anthropologique occidentale réside moins dans la distinction de l’âme et du corps, ou de la chair et de l’esprit, que dans leur indissoluble union. » (Sylviane Agacinski, Le corps humain et sa propriété face aux marchés, p. 10-11)
Transactivisme
Abigail Shrier : « Pendant des décennies, les psychologues ont traité [la "dysphorie de genre"] par “l’attente vigilante”, c’est-à-dire une méthode de psychothérapie qui vise à comprendre la source de la dysphorie de genre de l’enfant, à en atténuer l’intensité et, finalement, à aider l’enfant à se sentir plus à l’aise dans son propre corps.
« Mais au cours de la dernière décennie, l’attente vigilante a été supplantée par les soins affirmatifs ou “prise en charge positive”, qui part du principe que les enfants savent ce qui est le mieux. Les partisans des soins affirmatifs incitent les médecins à corroborer la conviction de leurs patients qu’ils sont piégés dans le mauvais corps. On fait pression sur la famille pour qu’elle aide l’enfant à changer d’identité sexuelle – parfois après que des médecins ou des militants leur aient dit que, s’ils ne le faisaient pas, leur enfant pourrait se suicider. À partir de là, des pressions s’exercent sur les parents pour qu’ils prennent des mesures médicales concrètes afin d’aider l’enfant sur la voie de la transition vers le « bon » corps. Cela inclut la prescription d’agents inhibiteurs de puberté comme étape préliminaire. En général, des hormones transsexuelles suivent, puis, si on le souhaite, une chirurgie de genre. » (Abigail Shrier fait le point sur les inhibiteurs de puberté)
GPA
Sylviane Agacinski : « années 2000. Un journaliste interroge une jeune surrogate mother [américaine] d’environ 26 ans, qui vient de remettre le nouveau-né à ses parents “intentionnels”. Elle sourit beaucoup, explique qu’elle a déjà deux enfants et que, n’ayant pas d’emploi, elle avait besoin d’argent pour ajouter une chambre à sa modeste maison. Elle dit qu’elle va bien et qu’elle a fait un choix rationnel. Le journaliste lui demande tout de même si elle a été émue de se séparer de l’enfant dès sa naissance… Elle se trouble, se tait, puis éclate en sanglots et déclare à travers ses larmes : “Moi, je sais pourquoi j’ai fait ce que j’ai fait… mais c’est mon corps qui n’a pas compris.” […]
Ces pleurs m’ont bouleversée. Mais les mots de cette jeune femme m’ont également inquiétée, car elle était manifestement persuadée, ou on l’avait persuadée, que sa propre personne était séparée de son corps. […] Il me fallait réfléchir sur cette expérience et montrer les ravages d’une idéologie dualiste, aujourd'hui promue par le marché, qui brise l’unité de la personne et fait de son corps vivant un simple moyen. » (Sylviane Agacinski, “La maternité comme objet philosophique”, Les marchés de la maternité, éd. O. Jacob, p. 140-141)
(Lettre à François Hollande, Président de la République, après le vote du "mariage pour tous".
Il eût peut-être fallu, de même que pour la "PMA pour toutes", obtenir auparavant l'abolition universelle de la GPA…)
PS : « À la naissance, nous naissons simplement sexués. Et personne ne nous "assigne" ce sexe, fruit d’une rencontre entre un spermatozoïde et un ovule, résultat des lois de la biologie [… etc.]. La sexuation, par ailleurs, est immuable, inscrite dans presque toutes les cellules de notre corps. Aucune opération chirurgicale ne permet donc de "changer de sexe", contrairement à ce que prétendent tout un tas de charlatans sans vergogne ou d’ignares, contrairement à ce qu’affichent de nombreux sites internet promouvant le transgenrisme, parmi lesquels divers sites de cliniques ou d’hôpitaux peu scrupuleux (certainement parce que financièrement intéressés). Quelques rares sites de cliniques, d’hôpitaux ou de praticiens légèrement plus honnêtes que les autres rappellent cependant que "les interventions de réassignation sexuelle visent uniquement à changer l’apparence extérieure des organes génitaux" (autre exemple : sur le site de «"l’équipe chirurgicale TransParis" de l’Hôpital parisien de Tenon, il est écrit que "l’intervention chirurgicale permet d’obtenir des organes génitaux d’apparence extérieure naturelle et très voisine de l’anatomie féminine"). Bref, la chirurgie ne change pas le sexe d’un individu, seulement l’apparence de ses organes génitaux. Il est donc abusif — mensonger — de parler de "changement de sexe" ou de "réassignation sexuelle" ». (Audrey A. et Nicolas Casaux, “Le transgenrisme ou comment le sexisme pousse des jeunes à mutiler leurs corps sains” - extrait)
Alternative non-chirurgicale (et sans traitements hormonaux) : « Chez les Inuit […], l’identité et le genre ne sont pas fonction du sexe anatomique mais du genre de l’âme-nom réincarnée [d’un ancêtre]. Néanmoins, l’individu doit s’inscrire dans les activités et aptitudes qui sont celles de son sexe apparent (tâches et reproduction) le moment venu, même si son identité et son genre seront toujours fonction de son âme-nom. Ainsi, un garçon peut être, de par son âme-nom féminine, élevé et considéré comme une fille jusqu’à la puberté, remplir son rôle d’homme reproducteur à l’âge adulte et se livrer dès lors à des tâches masculines au sein du groupe familial et social, tout en conservant sa vie durant son âme-nom, c’est-à-dire son identité féminine. » (Françoise Héritier, Masculin/Féminin I, Odile Jacob Poches p. 21 – cf. p. 202-203 –, citant Bernard Saladin d’Anglure, « Iqallijuq ou les réminiscences d’une âme-nom inuit », Études Inuit 1 / 1 : 33-63)
Transactivisme
Abigail Shrier : « Pendant des décennies, les psychologues ont traité [la "dysphorie de genre"] par “l’attente vigilante”, c’est-à-dire une méthode de psychothérapie qui vise à comprendre la source de la dysphorie de genre de l’enfant, à en atténuer l’intensité et, finalement, à aider l’enfant à se sentir plus à l’aise dans son propre corps.
« Mais au cours de la dernière décennie, l’attente vigilante a été supplantée par les soins affirmatifs ou “prise en charge positive”, qui part du principe que les enfants savent ce qui est le mieux. Les partisans des soins affirmatifs incitent les médecins à corroborer la conviction de leurs patients qu’ils sont piégés dans le mauvais corps. On fait pression sur la famille pour qu’elle aide l’enfant à changer d’identité sexuelle – parfois après que des médecins ou des militants leur aient dit que, s’ils ne le faisaient pas, leur enfant pourrait se suicider. À partir de là, des pressions s’exercent sur les parents pour qu’ils prennent des mesures médicales concrètes afin d’aider l’enfant sur la voie de la transition vers le « bon » corps. Cela inclut la prescription d’agents inhibiteurs de puberté comme étape préliminaire. En général, des hormones transsexuelles suivent, puis, si on le souhaite, une chirurgie de genre. » (Abigail Shrier fait le point sur les inhibiteurs de puberté)
GPA
Sylviane Agacinski : « années 2000. Un journaliste interroge une jeune surrogate mother [américaine] d’environ 26 ans, qui vient de remettre le nouveau-né à ses parents “intentionnels”. Elle sourit beaucoup, explique qu’elle a déjà deux enfants et que, n’ayant pas d’emploi, elle avait besoin d’argent pour ajouter une chambre à sa modeste maison. Elle dit qu’elle va bien et qu’elle a fait un choix rationnel. Le journaliste lui demande tout de même si elle a été émue de se séparer de l’enfant dès sa naissance… Elle se trouble, se tait, puis éclate en sanglots et déclare à travers ses larmes : “Moi, je sais pourquoi j’ai fait ce que j’ai fait… mais c’est mon corps qui n’a pas compris.” […]
Ces pleurs m’ont bouleversée. Mais les mots de cette jeune femme m’ont également inquiétée, car elle était manifestement persuadée, ou on l’avait persuadée, que sa propre personne était séparée de son corps. […] Il me fallait réfléchir sur cette expérience et montrer les ravages d’une idéologie dualiste, aujourd'hui promue par le marché, qui brise l’unité de la personne et fait de son corps vivant un simple moyen. » (Sylviane Agacinski, “La maternité comme objet philosophique”, Les marchés de la maternité, éd. O. Jacob, p. 140-141)
(Lettre à François Hollande, Président de la République, après le vote du "mariage pour tous".
Il eût peut-être fallu, de même que pour la "PMA pour toutes", obtenir auparavant l'abolition universelle de la GPA…)
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PS : « À la naissance, nous naissons simplement sexués. Et personne ne nous "assigne" ce sexe, fruit d’une rencontre entre un spermatozoïde et un ovule, résultat des lois de la biologie [… etc.]. La sexuation, par ailleurs, est immuable, inscrite dans presque toutes les cellules de notre corps. Aucune opération chirurgicale ne permet donc de "changer de sexe", contrairement à ce que prétendent tout un tas de charlatans sans vergogne ou d’ignares, contrairement à ce qu’affichent de nombreux sites internet promouvant le transgenrisme, parmi lesquels divers sites de cliniques ou d’hôpitaux peu scrupuleux (certainement parce que financièrement intéressés). Quelques rares sites de cliniques, d’hôpitaux ou de praticiens légèrement plus honnêtes que les autres rappellent cependant que "les interventions de réassignation sexuelle visent uniquement à changer l’apparence extérieure des organes génitaux" (autre exemple : sur le site de «"l’équipe chirurgicale TransParis" de l’Hôpital parisien de Tenon, il est écrit que "l’intervention chirurgicale permet d’obtenir des organes génitaux d’apparence extérieure naturelle et très voisine de l’anatomie féminine"). Bref, la chirurgie ne change pas le sexe d’un individu, seulement l’apparence de ses organes génitaux. Il est donc abusif — mensonger — de parler de "changement de sexe" ou de "réassignation sexuelle" ». (Audrey A. et Nicolas Casaux, “Le transgenrisme ou comment le sexisme pousse des jeunes à mutiler leurs corps sains” - extrait)
Alternative non-chirurgicale (et sans traitements hormonaux) : « Chez les Inuit […], l’identité et le genre ne sont pas fonction du sexe anatomique mais du genre de l’âme-nom réincarnée [d’un ancêtre]. Néanmoins, l’individu doit s’inscrire dans les activités et aptitudes qui sont celles de son sexe apparent (tâches et reproduction) le moment venu, même si son identité et son genre seront toujours fonction de son âme-nom. Ainsi, un garçon peut être, de par son âme-nom féminine, élevé et considéré comme une fille jusqu’à la puberté, remplir son rôle d’homme reproducteur à l’âge adulte et se livrer dès lors à des tâches masculines au sein du groupe familial et social, tout en conservant sa vie durant son âme-nom, c’est-à-dire son identité féminine. » (Françoise Héritier, Masculin/Féminin I, Odile Jacob Poches p. 21 – cf. p. 202-203 –, citant Bernard Saladin d’Anglure, « Iqallijuq ou les réminiscences d’une âme-nom inuit », Études Inuit 1 / 1 : 33-63)
mercredi 27 juillet 2022
Existence / préexistence
Un enfer dont chaque instant est un miracle…
Peut-être est-ce ce qui subsiste de l'héritage cathare, effacé entre le martyre de Montségur et celui de Bélibaste – expiant la faute indicible produisant l'existence…
Peut-être est-ce ce qui subsiste de l'héritage cathare, effacé entre le martyre de Montségur et celui de Bélibaste – expiant la faute indicible produisant l'existence…
« Je ne me pardonne pas d’être né. C’est comme si, en m’insinuant dans ce monde, j’avais profané un mystère, trahi quelque engagement de taille, commis une faute d’une gravité sans nom. Cependant il m’arrive d’être moins tranchant : naître m’apparaît alors comme une calamité que je serais inconsolable de n’avoir pas connue. »(Cioran, De l'inconvénient d'être né)
« Françoise Dolto avait l'habitude de dire aux enfants qui se plaignaient de leurs parents : "Tu n'avais qu'à pas choisir de naître là." Elle cherchait sans doute ainsi à sortir l'enfant d'un fatalisme héréditaire pour lui faire reprendre la main sur son histoire, et le convaincre qu'il n'était pas aussi impuissant qu'il le croyait.(Delphine Horvilleur, Comment les rabbins font les enfants : Sexe, transmission et identité dans le judaïsme, Grasset, 2015)
La mystique juive est à sa manière un peu "doltienne". Elle suggère en tout cas que chaque être choisit avant de venir au monde les parents qui lui donneront naissance […]. Nos parents répondraient ainsi aux besoins de notre âme. L'idée est séduisante quand elle responsabilise la personne et lui permet de ne plus placer papa-maman sur le banc des accusés permanents et exclusifs de ses échecs. »
« Nous sommes tous au fond d’un enfer dont chaque instant est un miracle. »(Cioran, Le mauvais démiurge - aphorisme final -, Œuvres p. 1259)
mardi 26 juillet 2022
"Sionisme"...
1948 : double décolonisation de la Palestine britannique, similaire aux autres décolonisations, avec ici, création/reconnaissance de deux réalités nationales, juive et arabe…
Auparavant : retour sur l’histoire de la Palestine
135 - Création de la province romaine de Syrie-Palestine | En 135, les troupes romaines écrasent dans le sang une révolte menée par Shimon bar Kokhba. Jérusalem (devenue après 70 Ælia Capitolina en l'honneur de Jupiter) est rasée. Elle est déclarée cité romaine et interdite aux juifs sous peine de mort. Le royaume de Judée est définitivement aboli et intégré dans une nouvelle province romaine nommée Syrie-Palestine. Pour supprimer toute allusion au peuplement juif de la Judée, les Romains utilisent le nom « Palaestina », un mot de la même racine que Philistin. La formule séculaire de la liturgie juive “l’an prochain à Jérusalem” entretiendra l'espérance du retour. Elle est à la racine du “sionisme” (fin XIXe s. - début XXe s.), référant au mont Sion symbolisant Jérusalem.
Jusqu’en 614 - Période romaine, puis, à partir de 324, première période romaine byzantine
614-629 - Période perse sassanide
629-638 - Deuxième période byzantine
638-1073 - Période arabe (omeyyade / 750 abbasside / 909 fatimide)
1073-1098 - Première période turque (seldjoukide)
1099-1187 - Période du royaume latin de Jérusalem
1187-1261 - Du règne de Saladin (Kurde) au contrôle de Jérusalem par les Mamelouks
1261-1516 - Période des Mamelouks (Égyptiens/Turcs)
1516-1917 - Deuxième période turque (ottomane)
1917-1948 - Occupation puis mandat (1922/23) britannique
1948 - Décolonisation et double indépendance : juive et arabe | Le recensement britannique officiel de 1931 révèle la composition religieuse suivante : 759 717 musulmans, 174 610 Juifs, 91 398 chrétiens, 9 148 druzes, 350 bahá’ís, 182 Samaritains et 421 « sans religion ». Auparavant : au VIe siècle, deux siècles après la conversion de l'Empire romain, les chrétiens sont majoritaires en Palestine, aux côtés desquels on trouve une forte minorité juive, des Arabes païens et une petite communauté samaritaine. Pendant la période des Mamelouks égyptiens, qui prennent en 1250 le pouvoir en Égypte et contrôlent la Palestine, la Palestine accueille des réfugiés arabes chassés par l’avancée des Mongols sur l’Irak et la Syrie, et vers la fin du XVe siècle, elle accueille les réfugiés juifs chassés d’Espagne, notamment en Galilée, où la ville de Safed est à l’origine d’un important rayonnement intellectuel et religieux juif (cf. Isaac Luria).
Suite...
Auparavant : retour sur l’histoire de la Palestine
135 - Création de la province romaine de Syrie-Palestine | En 135, les troupes romaines écrasent dans le sang une révolte menée par Shimon bar Kokhba. Jérusalem (devenue après 70 Ælia Capitolina en l'honneur de Jupiter) est rasée. Elle est déclarée cité romaine et interdite aux juifs sous peine de mort. Le royaume de Judée est définitivement aboli et intégré dans une nouvelle province romaine nommée Syrie-Palestine. Pour supprimer toute allusion au peuplement juif de la Judée, les Romains utilisent le nom « Palaestina », un mot de la même racine que Philistin. La formule séculaire de la liturgie juive “l’an prochain à Jérusalem” entretiendra l'espérance du retour. Elle est à la racine du “sionisme” (fin XIXe s. - début XXe s.), référant au mont Sion symbolisant Jérusalem.
Jusqu’en 614 - Période romaine, puis, à partir de 324, première période romaine byzantine
614-629 - Période perse sassanide
629-638 - Deuxième période byzantine
638-1073 - Période arabe (omeyyade / 750 abbasside / 909 fatimide)
1073-1098 - Première période turque (seldjoukide)
1099-1187 - Période du royaume latin de Jérusalem
1187-1261 - Du règne de Saladin (Kurde) au contrôle de Jérusalem par les Mamelouks
1261-1516 - Période des Mamelouks (Égyptiens/Turcs)
1516-1917 - Deuxième période turque (ottomane)
1917-1948 - Occupation puis mandat (1922/23) britannique
1948 - Décolonisation et double indépendance : juive et arabe | Le recensement britannique officiel de 1931 révèle la composition religieuse suivante : 759 717 musulmans, 174 610 Juifs, 91 398 chrétiens, 9 148 druzes, 350 bahá’ís, 182 Samaritains et 421 « sans religion ». Auparavant : au VIe siècle, deux siècles après la conversion de l'Empire romain, les chrétiens sont majoritaires en Palestine, aux côtés desquels on trouve une forte minorité juive, des Arabes païens et une petite communauté samaritaine. Pendant la période des Mamelouks égyptiens, qui prennent en 1250 le pouvoir en Égypte et contrôlent la Palestine, la Palestine accueille des réfugiés arabes chassés par l’avancée des Mongols sur l’Irak et la Syrie, et vers la fin du XVe siècle, elle accueille les réfugiés juifs chassés d’Espagne, notamment en Galilée, où la ville de Safed est à l’origine d’un important rayonnement intellectuel et religieux juif (cf. Isaac Luria).
Suite...
lundi 25 juillet 2022
"Antisionisme"...
« L'antisémitisme est le socialisme des imbéciles ». La célèbre citation est fréquemment attribuée à August Bebel (1840-1913), dirigeant du Parti social-démocrate d'Allemagne, mais vient probablement du social-démocrate autrichien Ferdinand Kronawetter. Elle était souvent utilisée parmi les sociaux-démocrates allemands dans les années 1890. Lénine rend hommage à Bebel lors de sa mort. Lorsque le journal socialiste new-yorkais The Forward érige son nouveau siège en 1912, il est orné de bas-reliefs figurant Marx, Engels, Lassalle et Bebel.
Extrait de “L'antisémitisme et les mouvements de gauche” de Valéry Rasplus, recension in Nonfiction de : Michel Dreyfus, L'antisémitisme à gauche. Histoire d'un paradoxe, de 1830 à nos jours, La Découverte, 2009 :
« “La fin de la Seconde Guerre mondiale connut un mélange de dégoût, d'abasourdissement et de rancœurs. L'heure était à l'épuration confuse et à l'occultation relative du génocide au profit de deux autres mémoires (…), celles de la Résistance et de la déportation". On trouvait à gauche encore de l'antisémitisme au sein de la SFIO ou au PCF qui, chez ce dernier, s'alignait directement sur la ligne soviétique telle qu'elle fut vécue lors du procès stalinien dit des "blouses blanches". Ce moment d'antisémitisme communiste remplaça subtilement "la désignation de juif par celle de sioniste" sans être soupçonné d'antisémitisme.
Restructuration de l'antisémitisme
« Dans les années soixante, alors que des structures pacifistes et anarchistes furent relativement négligeantes avec des sympathisants que l'on désigna comme "révisionnistes", une partie de l'ultra-gauche (La Veille Taupe, etc.) prit fait et cause avec l'idéologie "négationniste" (Robert Faurisson, etc.), niant l'existence des chambres à gaz (ce "mensonge", cette "invention", cette "imposture politico-financière") et ce que l'on a nommé l'Holocauste ou Shoah. Auschwitz servirait d'alibi à Israël pour justifier sa création et son existence sur la base de l'idéologie sioniste, "phénomène colonial [qui] a fondé un État sur des terres spoliées". La question de l'antifascisme est vue chez cette fraction de l'ultra-gauche comme "un mensonge idéologique et politique qui a permis au capitalisme de se maintenir au terme du conflit" permettant "à la bourgeoisie de paralyser le prolétariat" le détournant de son action révolutionnaire. L'antisémtisme circula progressivement du négationnisme, voué à un rôle marginal, à l'antisionisme dont l'audience, plus importante, traverse même aujourd'hui les partis politiques, les syndicats, les associations, etc. »
(Problème redoutable : l'ONU, Amnesty International, etc., ont succombé au vocabulaire de l'"antisionisme", ce nouveau cache-sexe de l'antisémitisme, qui conduit carrément dans leurs textes au détournement de termes comme "apartheid", mot afrikaans, étranger à la question israélo-palestinienne… Et personne n'interroge ces organismes internationaux, préférant viser ceux qui - hélas - les reprennent !)
Extrait de “L'antisémitisme et les mouvements de gauche” de Valéry Rasplus, recension in Nonfiction de : Michel Dreyfus, L'antisémitisme à gauche. Histoire d'un paradoxe, de 1830 à nos jours, La Découverte, 2009 :
« “La fin de la Seconde Guerre mondiale connut un mélange de dégoût, d'abasourdissement et de rancœurs. L'heure était à l'épuration confuse et à l'occultation relative du génocide au profit de deux autres mémoires (…), celles de la Résistance et de la déportation". On trouvait à gauche encore de l'antisémitisme au sein de la SFIO ou au PCF qui, chez ce dernier, s'alignait directement sur la ligne soviétique telle qu'elle fut vécue lors du procès stalinien dit des "blouses blanches". Ce moment d'antisémitisme communiste remplaça subtilement "la désignation de juif par celle de sioniste" sans être soupçonné d'antisémitisme.
Restructuration de l'antisémitisme
« Dans les années soixante, alors que des structures pacifistes et anarchistes furent relativement négligeantes avec des sympathisants que l'on désigna comme "révisionnistes", une partie de l'ultra-gauche (La Veille Taupe, etc.) prit fait et cause avec l'idéologie "négationniste" (Robert Faurisson, etc.), niant l'existence des chambres à gaz (ce "mensonge", cette "invention", cette "imposture politico-financière") et ce que l'on a nommé l'Holocauste ou Shoah. Auschwitz servirait d'alibi à Israël pour justifier sa création et son existence sur la base de l'idéologie sioniste, "phénomène colonial [qui] a fondé un État sur des terres spoliées". La question de l'antifascisme est vue chez cette fraction de l'ultra-gauche comme "un mensonge idéologique et politique qui a permis au capitalisme de se maintenir au terme du conflit" permettant "à la bourgeoisie de paralyser le prolétariat" le détournant de son action révolutionnaire. L'antisémtisme circula progressivement du négationnisme, voué à un rôle marginal, à l'antisionisme dont l'audience, plus importante, traverse même aujourd'hui les partis politiques, les syndicats, les associations, etc. »
(Problème redoutable : l'ONU, Amnesty International, etc., ont succombé au vocabulaire de l'"antisionisme", ce nouveau cache-sexe de l'antisémitisme, qui conduit carrément dans leurs textes au détournement de termes comme "apartheid", mot afrikaans, étranger à la question israélo-palestinienne… Et personne n'interroge ces organismes internationaux, préférant viser ceux qui - hélas - les reprennent !)
samedi 16 juillet 2022
80 ans
Cérémonie à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etats français et d’hommage aux « Justes » de France organisée
le dimanche 17 juillet, devant la stèle de l’ancien camp d’internement de la route de Limoges – rue du Père Jean de Fleury.
· 8h45 : Rassemblement devant la stèle
· 9h : début de la cérémonie
Et, du 19 au 25 septembre
Exposition / Tables rondes / Projection
Espace Mendès France, Poitiers
Voir ICI et ICI
vendredi 1 juillet 2022
Création & intermédiaires
Philon d'Alexandrie explique la présence dans la Création d'un mal qui ne peut être
attribué à Dieu par une hiérarchie d'intermédiaires intervenant dans la Création. À leur tête est le
logos. Puis d'autres puissances intermédiaires participent à la création de l'homme, sujet à un
mélange de bien et de mal. L'univers manifeste une hiérarchie démiurgique où l'Être suprême
crée le monde intelligible, la puissance "poétique" la quintessence, et la puissance "royale" le
monde sublunaire.
(R.P., Cioran, entre Job et le catharisme, p. 123)
mercredi 22 juin 2022
In memoriam
12e Journée René Nelli au château de Bouisse samedi 25 juin 2022
HOMMAGE A MICHEL ROQUEBERT,
témoin essentiel de l’histoire du Languedoc médiéval,
esthète et philosophe, journaliste, combattant de la vérité,
auteur de « L’Épopée cathare », chevalier des Arts et Lettres
Voir ici : L’épopée cathare, au cœur d’une civilisation effacée
HOMMAGE A MICHEL ROQUEBERT,
témoin essentiel de l’histoire du Languedoc médiéval,
esthète et philosophe, journaliste, combattant de la vérité,
auteur de « L’Épopée cathare », chevalier des Arts et Lettres
Voir ici : L’épopée cathare, au cœur d’une civilisation effacée
vendredi 22 avril 2022
Wikipédia et le catharisme
L’article “catharisme” de l’encyclopédie en ligne Wikipédia est un exemple remarquable de ce qu’il faut lire pour être sûr de ne rien comprendre au catharisme. Heureusement nous sommes toutefois prévenus d’entrée : “La pertinence du contenu de cet article est remise en cause”. Hormis cet avertissement, l'article est non modifiable : quelques historiens de ma connaissance s’y sont essayés à plusieurs reprises et se sont vus à chaque fois immédiatement censurés par un vigilant propriétaire* (?) de l'article jugeant à rejeter, sous le terme “POV” (Point of view, i.e. “subjectif”), toute divergence quant à son approche auto-proclamée objective…
La section “étymologie” illustre remarquablement la méthode. Une pétition de principe (fausse : cf. infra), qui était annoncée dès l’introduction, oriente tout le développement : le terme “cathare” viendrait de l'occitanisme des années 1960. L'affirmation est erronée, fût-elle appuyée d’un article déjà ancien de Julien Théry, cité à de nombreuses reprises dans la section, mais réfuté depuis longtemps, notamment par Michel Roquebert…
La section “étymologie” commence ainsi :
“Le nom de ‘cathares’ a été donné par les adversaires de ce mouvement et il faut noter qu'il est tout simplement absent des milliers de protocoles de l'Inquisition languedocienne, où il n'est mentionné par aucun inquisiteur, accusé ou témoin de la persécution, pas plus qu'il n'est présent chez quelque auteur médiéval ou dans quelque récit de la croisade albigeoise que ce soit.
En outre, c'est tardivement qu'il a été adopté par les historiens : c’est en effet seulement depuis les années 1950 que le terme de ‘cathare’ est plus largement préféré à d'autres […]”.
On nous concède généreusement, momentanément, un point de départ dans les années 1950, pour revenir en fin de section sur le postulat de départ – années 1960 : “Repris et popularisé en français par l'occitanisme des années 1960 en opposition au centralisme ‘jacobin’ et parisien, le terme cathare, s'il manque de neutralité, est celui qui s’est imposé, même s'il ne sert jamais dans les sources médiévales à désigner les hérétiques du sud de la France […]”.
Au seul appui du récit de la Croisade contre les Albigeois (Hystoria albigensis) et d’une lecture erronée du canon 27 du concile de Latran III, on nous assure que l'hérésie était, en Occitanie, intitulée “albigeoise”. Et on nous parle d’“albigéisme”, de façon tout à fait anachronique, puisque le terme, désignant une doctrine (et non plus seulement le cœur d’une région), est dû à la Réforme protestante. Ce faisant on rend inaccessible au lecteur le simple fait que l’Albigeois, notion géographique, a subi une croisade pour fait de catharisme, notion religieuse désignant ce que les textes nomment plus communément “hérésie” (intitulé le plus fréquent, seul point que l’article de Wikipédia remarque à juste titre).
L’article concède, dans une démarche chère aux "déconstructivistes", qu'on peut faire remonter le terme “cathares” plus haut qu’à 1960, au XIXe siècle, avec l’historien protestant alsacien Charles Schmidt “relançant” en 1848 une expression médiévale proche de sa région, sans que celui-ci, Schmidt, n’ait remarqué qu’elle n’aurait au Moyen Âge concerné que la Rhénanie voisine de l’Alsace, bref la zone germanique, ce que l’article souligne à l’envi (concédant toutefois que ce terme germanique a pu s’étendre à l’Italie du Nord… Difficile de l’éviter quand un traité médiéval s’intitule carrément De heresi catarorum in Lombardia).
À l'appui de l'idée de la quasi exclusivité rhénane du terme, l’article a insisté précédemment longuement sur le fait, déjà signalé par Jean Duvernoy dès les années 1970, que le terme apparaît dans les sources médiévales effectivement pour la première fois en Rhénanie.
L'article de Wikipédia, suivant le courant "déconstructiviste", y trouve un appui à son postulat de départ et de fin de section : le terme, germanique, ne concerne pas l'Occitanie jusqu’à ce que les occitanistes des années 1960 (ou tout au plus 1950) le fassent leur.
CQFD ! Sauf que cela se fait au prix de l'occultation de plusieurs sources, parlant bien au Moyen Âge de "cathares" concernant l'Occitanie, quoiqu'en veuille le premier paragraphe de la section, nous assénant que le terme n’est pas utilisé par les Inquisiteurs (ce qui est juste) “pas plus qu'il n'est présent chez quelque auteur médiéval” (ce qui est faux).
L’article ne mentionne ni le Contra manicheos qui, début XIIIe siècle, appelle cathares les hérétiques méridionaux (“les manichéens, c’est-à-dire les actuels cathares qui habitent dans les diocèses d’Albi, de Toulouse et de Carcassonne”), ni la lettre du pape Innocent III aux prélats méridionaux, les mettant en garde en 1198 contre ceux qu’il appelle notamment cathares, lettre enchaînant sur la mise en garde du concile réuni vingt ans avant par son prédécesseur Alexandre III, Latran III (1179). Le concile est bien cité par l’article, en son canon 27, mais d'une façon qui en déforme le contenu, qui contredirait le postulat de base. Non seulement le canon 27 ne fait pas de l’”albigéisme” (dont il ne parle pas) une hérésie à côté de celle des cathares, mais il dit que la région de l’Albigeois, comme celles de la Gascogne, du Toulousain, et d’autres, est infestée de cathares (“dans la Gascogne et les régions d’Albi et Toulouse et dans d’autres endroits l’infâme hérésie de ceux que certains appellent cathares, d’autres patarins, d’autres publicains et d’autres par des noms différents, a connu une croissance si forte qu’ils ne pratiquent plus leur perversité en secret, comme les autres, mais proclament publiquement leur erreur”).
Autre omission significative, concernant Alain de Lille. Il est bien cité, mais nulle part n'apparaît qu’à l’époque où il écrit contre les hérétiques (que dans son développement, il nomme “cathares”), il n’est plus à Lille, mais à Montpellier, où il s’est installé après avoir assisté au concile de Latran III dont il reprend les termes contre les cathares dans sa somme dédicacée à Guilhem VIII de Montpellier, non sans tenter des étymologies douteuses sur le terme “cathares”, qu’il utilise, donc, pour les terres d’Oc). Omission qui permet à l’article de laisser penser qu’est visée la région de Lille (?), comme il omet de laisser paraître que Latran III canon 27 vise bel et bien les terres d’Oc. Alain a intitulé sa Somme quadripartite : Contre les hérétiques, contre les vaudois, contre les juifs, contre les payens – quatre catégories, donc, les cathares étant distingués, comme hérétiques, des dissidents vaudois, les païens désignant les musulmans.
Oubli aussi de Rainier Sacconi, l'ex-dignitaire cathare entré chez les Frères Prêcheurs, qui titre un des paragraphes de sa Summa de catharis : “Des Cathares toulousains, albigeois et carcassonnais”.
Méthode étrange que cette série d'omissions sélectives pour un article se voulant “objectif” !
Si l’on veut démêler l'écheveau confus que nous propose l'article de Wikipédia, il s’agit d’en venir vraiment aux textes, qui parlent effectivement au Moyen Âge préférentiellement d’“hérésie”. Mais lorsqu'il s’agit pour les polémistes d’essayer, dans des textes théologiques donc, de préciser en quoi consiste ladite hérésie, on trouve régulièrement les formules "manichéens", ou “cathares”, termes imprécis eux-mêmes et jamais revendiqués par les hérétiques, mais qui permettent aux hérésiologues médiévaux de les distinguer, notamment des vaudois.
À l'époque, “Albigeois” désigne un espace géographique “infesté” de l’hérésie. Au XVIe s., les protestants méridionaux se perçoivent comme héritiers des anciens hérétiques, qu’ils entendent dédouaner de l’accusation de catharisme (que l’enseignement protestant rejette). Ils ne seront donc pas considérés comme cathares, mais A(a)lbigeois, le terme commençant dès lors à prendre un sens religieux, celui d’une doctrine pré-réformatrice (Albigeois devenant “albigeois”, sans majuscule), à côté de celle des vaudois.
Bien avant Schmidt, Bossuet reprend les termes "manichéens" et "cathares" pour faire apparaître que les albigeois dont se réclament les protestants sont bel et bien des hérétiques. Schmidt, près de deux siècles après Bossuet, se rangera aux arguments de l’évêque de Meaux : les albigeois étaient bien cathares, hérétiques !
On est un siècle avant les occitanistes des années 1960, qui n’ont fait que reprendre le terme que les historiens avaient concédé : "cathares". Les occitanistes n’ont rien inventé ! Ils n’ont fait que constater que la répression d’une terre qui déboucherait sur celle d’une langue s’était faite sur la base de la répression d‘une hérésie que ses ennemis avaient qualifiée de “cathare” !…
RP, 22.04.22
* C'est à dire qui se comporte comme tel, et imperméable à l'argumentation en discussion. Cf. ici.
dimanche 17 avril 2022
jeudi 14 avril 2022
Pessah 5783
Pessah Sameah !
"Il les secourut à cause de son nom, pour faire connaître sa puissance.
Il apostropha la mer des Joncs, et elle se dessécha, il leur fit traverser les flots comme une terre sèche."
(Psaume 106, 8-9)
Voir aussi ICI
mercredi 16 mars 2022
samedi 12 mars 2022
Fatigué de la peine et de la souffrance
« On doit se ranger du côté des opprimés en toute circonstance même quand ils ont tort, sans pour autant perdre de vue qu’ils sont pétris de la même boue que leurs oppresseurs. » (Emil Cioran)
« Ayons pour toute victime, si noble soit-elle, une pitié sans illusions. » (Emil Cioran)
vendredi 25 février 2022
Guerre et bruits de guerre
Seigneur, Toi le Prince de la Paix, écoute notre prière.
Seigneur nous nous tournons vers Toi alors que les bruits de guerre résonnent en Europe.Seigneur reste proche du peuple ukrainien nié dans sa dignité d'être un peuple,
Seigneur brise l'orgueil des puissants, change les cœurs de pierre en cœurs de chair.Seigneur suscite des artisans de Paix et des ambassadeurs de réconciliation,
Seigneur, Toi qui a imposé le silence à la mer déchaînée, fais que se taisent les armes.Seigneur sème les prémices de Ton royaume sur les chemins de cette Terre,
Que ton règne vienne !
Amen (Prière EPUdF)
mardi 8 février 2022
Étrange nostalgie…
Au-delà de la hiérarchie fondée sur un pseudo “droit d’ainesse” qui serait celui d'un catholicisme romain identitaire (condamné par Rome dans l’“Action française”), transparaît le reliquat d'une autre hiérarchie remontant à l'époque officiellement coloniale, voire plus haut dans le temps…
On réinvente une hiérarchie, comme il y a un siècle et demi s’inventait celle décrite par Alphonse Daudet dans Tartarin de Tarascon (1872) : "le bourriquot algérien a les reins solides… il le faut bien pour supporter tout ce qu’il supporte… demandez plutôt aux Arabes. Voici comment ils expliquent notre organisation coloniale… en haut, disent-ils, il y a mouci le gouverneur, avec une grande trique, qui tape sur l’état-major ; l’état-major, pour se venger, tape sur le soldat ; le soldat tape sur le colon, le colon tape sur l’arabe, l’arabe tape sur le nègre, le nègre tape sur le juif, le juif à son tour tape sur le bourriquot ; et le pauvre petit bourriquot n’ayant personne sur qui taper, tend l’échine et porte tout"… (Et fait oublier les femmes et leur place dans cette hiérarchie…)
Les éléments "inférieurs", en-dessous de "l'Arabe", recoupent visiblement la hiérarchie préexistante de la dhimmitude (prédisposant elle-même à la hiérarchie “raciale” coloniale : “le nègre”, musulman en Algérie, et donc au-dessus “du juif”, est quand même au-dessous de “l’Arabe”). La hiérarchie de la tolérance contre l’égalité de la liberté. Le système colonial décrit par Tartarin de Tarascon reprend et adapte une dhimmitude archaïque — qui a transmis à la Chrétienté latine médiévale l'idée du port d’un signe distinctif repris ensuite sous Hitler et Pétain (l’ancienne rouelle imposée aux juifs et chrétiens en Islam de la dhimmitude et en Chrétienté médiévale pour les juifs, reprise au XXe s. comme étoile jaune). Demeure la hiérarchie dans les relations et les attitudes, de l'impudence à l'obséquiosité. Au temps de la publication de Tartarin de Tarascon, soit deux ans après le décret Crémieux — qui a pourtant modifié légalement en 1870 la hiérarchie en question —, celle-ci recoupe chez Tartarin et chez les nostalgiques de cette époque la reprise coloniale de la dhimmitude, retouchée en idéologie, esquissée déjà en Islam, de "la hiérarchie des 'races'" (expression qui correspond, on le sait, à la définition du racisme), qui fait subrepticement retour dans une (tacite) supposée “hiérarchie des cultures”. L’idéologie raciste revendiquée jusqu’en 1945, est, depuis, reléguée dans le passé, abattue avec le nazisme, dernier de ses tenants officiels. Ses derniers reliquats institutionnels ont disparu dans les années 1960 dans le Sud des États-Unis avec le combat pour les droits civiques et l’action de Martin Luther King, au début des années 1990 en Afrique du Sud avec la libération, puis l'élection, de Nelson Mandela. Cela pour les reliquats institutionnels, tandis que subsistent ici et là des reliquats plus ou moins inconscients. Trace par exemple lorsque telle ou telle mal-comprenance relègue les "noirs" dans le domaine des performances sportives ou musicales — cf. le "sens du rythme".
L'idéologie raciste qui a, disons, cinq siècles, se distingue évidemment de la xénophobie, immémoriale et partagée à un moment ou à un autre par tous les peuples. Car le racisme proprement dit est, lui, une idéologie précise, élaborée, qui substitue sa hiérarchie à toutes les autres, une hiérarchie disons phénotypique : invariablement "le blanc" est au sommet de cette hiérarchie. Pour ce qui est de ses zones inférieures, il y a une relative variabilité : en général les "noirs" sont relégués au plus bas, parfois (Kant par exemple) ce sont les "Amérindiens".
S'il peut donc y avoir des variantes par le bas, le seul invariant est que "le blanc" est au sommet. Ce qui doit mettre en question le concept nouveau de "racisme anti-blancs". Il n'y a jamais eu d'idéologie élaborée, à revendication "scientifique", inversant ladite "hiérarchie" ! D'où l'on peut considérer le lancement de ce concept (par l'extrême droite française, me semble-t-il) ; on peut considérer cette reprise retouchée comme une sorte d'escroquerie intellectuelle, et la reprise du concept de "racisme anti-blancs" par d'autres courants (de droite, voire de gauche) comme au mieux de la naïveté, au pire de la mauvaise foi.
Voilà qui demande quelque explication sur des comportements "anti-blancs", entendons "anti-occidentaux", avérés, notamment en Occident — dans les violences perpétrées dans des milieux issus de l'immigration. Il faut alors parler de ressentiment intense à la mesure de la violence de son expression. Or la caractéristique du ressentiment est qu'il est captif de sa propre frustration. En d'autres termes, ce que l'on appelle de façon bien simpliste "racisme anti-blancs" est une explosion, jamais théorisée (mais aisément instrumentalisable et potentiellement manipulée, notamment par les islamistes), d'un ressentiment intense qui assume sans s'en rendre clairement compte les reliquats toujours actifs de l'ancienne hiérarchie coloniale. Un fort sentiment d'infériorité, dont la violence de l'expression est à la mesure du sentiment d'impuissance qu'elle exprime. Aucune théorisation, expression d'une impuissance explosive. Explosions sporadiques, advenant souvent en Occident, mais pas uniquement, et qui trahissent cet inconscient intégré de part et d'autre. Car la revendication d’une hiérarchie basée sur un prétendu “droit d'aînesse” relève aussi du ressentiment, similaire, enfoui dans les inconscients au temps de Tartarin de Tarascon…
La voie de la libération des uns comme des autres est malgré tout en marche tout simplement parce que l'on sait, ou que l’on peut savoir. Et la liberté en marche par rapport à cet héritage-là, abattu en 1945, est le fondement de l'égalité qui ouvre sur la fraternité. Mais le chemin pourrait être long !…
On réinvente une hiérarchie, comme il y a un siècle et demi s’inventait celle décrite par Alphonse Daudet dans Tartarin de Tarascon (1872) : "le bourriquot algérien a les reins solides… il le faut bien pour supporter tout ce qu’il supporte… demandez plutôt aux Arabes. Voici comment ils expliquent notre organisation coloniale… en haut, disent-ils, il y a mouci le gouverneur, avec une grande trique, qui tape sur l’état-major ; l’état-major, pour se venger, tape sur le soldat ; le soldat tape sur le colon, le colon tape sur l’arabe, l’arabe tape sur le nègre, le nègre tape sur le juif, le juif à son tour tape sur le bourriquot ; et le pauvre petit bourriquot n’ayant personne sur qui taper, tend l’échine et porte tout"… (Et fait oublier les femmes et leur place dans cette hiérarchie…)
Les éléments "inférieurs", en-dessous de "l'Arabe", recoupent visiblement la hiérarchie préexistante de la dhimmitude (prédisposant elle-même à la hiérarchie “raciale” coloniale : “le nègre”, musulman en Algérie, et donc au-dessus “du juif”, est quand même au-dessous de “l’Arabe”). La hiérarchie de la tolérance contre l’égalité de la liberté. Le système colonial décrit par Tartarin de Tarascon reprend et adapte une dhimmitude archaïque — qui a transmis à la Chrétienté latine médiévale l'idée du port d’un signe distinctif repris ensuite sous Hitler et Pétain (l’ancienne rouelle imposée aux juifs et chrétiens en Islam de la dhimmitude et en Chrétienté médiévale pour les juifs, reprise au XXe s. comme étoile jaune). Demeure la hiérarchie dans les relations et les attitudes, de l'impudence à l'obséquiosité. Au temps de la publication de Tartarin de Tarascon, soit deux ans après le décret Crémieux — qui a pourtant modifié légalement en 1870 la hiérarchie en question —, celle-ci recoupe chez Tartarin et chez les nostalgiques de cette époque la reprise coloniale de la dhimmitude, retouchée en idéologie, esquissée déjà en Islam, de "la hiérarchie des 'races'" (expression qui correspond, on le sait, à la définition du racisme), qui fait subrepticement retour dans une (tacite) supposée “hiérarchie des cultures”. L’idéologie raciste revendiquée jusqu’en 1945, est, depuis, reléguée dans le passé, abattue avec le nazisme, dernier de ses tenants officiels. Ses derniers reliquats institutionnels ont disparu dans les années 1960 dans le Sud des États-Unis avec le combat pour les droits civiques et l’action de Martin Luther King, au début des années 1990 en Afrique du Sud avec la libération, puis l'élection, de Nelson Mandela. Cela pour les reliquats institutionnels, tandis que subsistent ici et là des reliquats plus ou moins inconscients. Trace par exemple lorsque telle ou telle mal-comprenance relègue les "noirs" dans le domaine des performances sportives ou musicales — cf. le "sens du rythme".
L'idéologie raciste qui a, disons, cinq siècles, se distingue évidemment de la xénophobie, immémoriale et partagée à un moment ou à un autre par tous les peuples. Car le racisme proprement dit est, lui, une idéologie précise, élaborée, qui substitue sa hiérarchie à toutes les autres, une hiérarchie disons phénotypique : invariablement "le blanc" est au sommet de cette hiérarchie. Pour ce qui est de ses zones inférieures, il y a une relative variabilité : en général les "noirs" sont relégués au plus bas, parfois (Kant par exemple) ce sont les "Amérindiens".
S'il peut donc y avoir des variantes par le bas, le seul invariant est que "le blanc" est au sommet. Ce qui doit mettre en question le concept nouveau de "racisme anti-blancs". Il n'y a jamais eu d'idéologie élaborée, à revendication "scientifique", inversant ladite "hiérarchie" ! D'où l'on peut considérer le lancement de ce concept (par l'extrême droite française, me semble-t-il) ; on peut considérer cette reprise retouchée comme une sorte d'escroquerie intellectuelle, et la reprise du concept de "racisme anti-blancs" par d'autres courants (de droite, voire de gauche) comme au mieux de la naïveté, au pire de la mauvaise foi.
Voilà qui demande quelque explication sur des comportements "anti-blancs", entendons "anti-occidentaux", avérés, notamment en Occident — dans les violences perpétrées dans des milieux issus de l'immigration. Il faut alors parler de ressentiment intense à la mesure de la violence de son expression. Or la caractéristique du ressentiment est qu'il est captif de sa propre frustration. En d'autres termes, ce que l'on appelle de façon bien simpliste "racisme anti-blancs" est une explosion, jamais théorisée (mais aisément instrumentalisable et potentiellement manipulée, notamment par les islamistes), d'un ressentiment intense qui assume sans s'en rendre clairement compte les reliquats toujours actifs de l'ancienne hiérarchie coloniale. Un fort sentiment d'infériorité, dont la violence de l'expression est à la mesure du sentiment d'impuissance qu'elle exprime. Aucune théorisation, expression d'une impuissance explosive. Explosions sporadiques, advenant souvent en Occident, mais pas uniquement, et qui trahissent cet inconscient intégré de part et d'autre. Car la revendication d’une hiérarchie basée sur un prétendu “droit d'aînesse” relève aussi du ressentiment, similaire, enfoui dans les inconscients au temps de Tartarin de Tarascon…
La voie de la libération des uns comme des autres est malgré tout en marche tout simplement parce que l'on sait, ou que l’on peut savoir. Et la liberté en marche par rapport à cet héritage-là, abattu en 1945, est le fondement de l'égalité qui ouvre sur la fraternité. Mais le chemin pourrait être long !…
RP
Cf. aussi...