mardi 2 janvier 2024

Alliance éternellement nouvelle


“En parlant d’une alliance nouvelle, il a rendu ancienne la première ; or ce qui devient ancien et qui vieillit est près de disparaître.” (Hébreux 8, 13)

Face à l'alliance éternellement nouvelle (scellée d'éternité dans les cœurs), la forme temporelle de l'alliance, avec ses rites, qu'ils soient juifs, chrétiens, etc, est renvoyée à sa temporalité, à sa réalité passagère. Or, pour l'épître aux Hébreux, la manifestation de l'alliance éternelle est advenue - en ces jours qui sont les derniers (cf. Hé 1, v. 2). Dès lors, le temps étant à son terme, tout ce qui se déploie dans le temps – y compris les rites (qu'ils soient juifs, chrétiens ou autres), qui ne sont que l'ombre du modèle céleste et éternel, est près de disparaître. Si le "pas encore" subsiste encore provisoirement, le déjà est tout proche, qui verra disparaître ce qui relève de ce temps.
L’Alliance nouvelle n'est pas le christianisme, et ne date pas du moment de l'épître, ni de celui de Jérémie (cf. Jr 33). Elle est la signification éternelle de tout rite (cf. la réalité ultime signifiée par "le modèle sur la montagne" du Sinaï – Exode 25, 40). Le christianisme a des rites terrestres, comme baptême, cène (etc.), qui signifient une réalité éternelle, comme les rites juifs. Les uns comme les autres sont terrestres et symboliques. Les rites chrétiens, exprimant la foi en Christ, reçus de la foi en Christ, sont consécutifs à cette foi en Christ (qui voit en lui l'officiant du tabernacle éternel). Cela n'est pas la foi des juifs, qui eux, reçoivent les rites de la Torah. La distinction que fait l’épître aux Hébreux, écrite avant l'instauration du christianisme et de son rituel (et donc la nouvelle alliance n'est pas le christianisme), n'est pas entre alliance juive et alliance chrétienne, mais entre alliance temporelle (sous forme juive ou chrétienne), dotée de rites symboliques, et alliance éternelle, sans rite terrestre aucun.

RP

Cf. Henry Corbin, L’Homme et son Ange :

“C'est un charisme dispensé aux intelligences que de se vouer à la recherche (la Quête) ; le dénouement de la recherche, c'est de trouver. Le signe qui marque l’acte de trouver, c’est la douceur que l’on goûte dans ce que l’on trouve. De toute eau douce l’apparent est un breuvage. Mais le caché en est voilé. Quiconque le cherche, ne se fatigue jamais de méditer, tandis que le commun des gens ne comprennent rien à ce qu’il cherche” (Le Livre du Sage et du disciple, IXe-Xe s.). Et le prône de préciser : cette recherche de la gnose est un droit, et parce qu’elle est un droit elle est un devoir. (Henry Corbin, L’Homme et son Ange, Fayard, 1983, p. 136-137)

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Pour la gnose ismaélienne, le sens intérieur, le sens spirituel […] est aussi le vrai sens ; c'est cela même qui la différencie du littéralisme de la religion islamique officielle et majoritaire, dont on peut dire [qu'il] a “perdu la Parole”, puisqu'il refuse le sens vrai, le sens caché du Verbe divin dans le Qôran. On pourrait dire [que] le Verbe divin apparaît revêtu d'un vêtement teinté de sang, signe des violences qu’a subies le Verbe divin de la part des exotéristes et des docteurs de la Loi qui le mutilent, en refusant ce qui […] est l’Esprit et la Vie. […] de cette Parole divine dont les docteurs de la Loi ont fait un cadavre. (Ibid., p. 85)

“T'imagines-tu donc […] que les Paroles de Dieu et les Livres de Dieu se contredisent l’un l'autre, ou bien que le Livre le plus ancien dément le plus récent et réciproquement ?” (Ibid., p. 102) Cf. note 1 : la Parole appartient au monde de l'Impératif créateur, tandis que le Livre appartient au monde créaturel. […] la différence entre la Parole et le Livre correspond, en un certain sens, à la différence entre l'Impératif et l'Acte. L'Acte est dans le temps et est récurrent. L'Impératif créateur est exempt de changement et de renouvellement. La Parole n'est susceptible ni d’abrogation ni de substitution, à la différence du Livre”.

=> Les différentes expressions rituelles relèvent du temps : les différentes religions sont aussi temporelles les unes que les autres, expressions temporelles ne faisant que signifier des référents cultuels, dont aucun n’annule la validité du référent précédent — RP.


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