mardi 24 décembre 2019

Les Mages, le Père Noël et les autres


oilà que se présentent les fameux Mages venus d’Orient (Matthieu 2, 1-12). Les voilà bientôt sacrés rois (en regard d'Ésaïe 60, du Psaume 72, etc.), trois rois représentant les trois continents d’alors (Afrique, Asie, Europe), là où Matthieu les présentait comme des sortes de prêtres – des savants dira-t-on bientôt, miraculeusement présents, grâce à leur science des étoiles, la nuit du 25 décembre -0001. Car voilà qu'on s’est mis à enseigner aussi que Jésus est né un 25 décembre. Mais, nous disent les savants, les successeurs des Mages en quelque sorte, le 25 décembre c'est impossible : les bergers de Luc ne pouvaient être dans les champs en cette saison. Et de nous faire remarquer que le 25 décembre est la date d'une fête païenne en l'honneur du soleil – vénéré alors sous la forme de telle ou telle divinité solaire, comme Mithra, une des figures de la religion mazdéenne d'alors, la religion des Mages.

Alors, fête du Messie biblique, Messie de Bethléem, ou fête païenne ? Controverse sempiternelle, d’autant plus vigoureuse que selon toute vraisemblance, non seulement il n'est pas né un 25 décembre, mais qu'en plus ce n'était d'ailleurs même pas en -0001 ! Et si alors, le problème était toujours celui de savoir si Jésus est le Messie biblique ou celui qui concerne aussi les païens ? Et si c'était toujours autant un faux débat qu'à l'époque ?

t si, comme tout en étant né à Bethléem en Judée, Jésus est aussi galiléen, – si sous un certain angle, un angle bien réel, Jésus était vraiment né un 25 décembre ? Si nos païens d'ancêtres dans la foi, avaient vraiment été saisis par l'Esprit de Dieu, Esprit par lequel on perçoit que ce Messie biblique concerne aussi les païens ? Qu'est-ce en effet que le 25 décembre ? C'est la fête du solstice d'hiver, selon un ancien calendrier romain (avant la mise en place par Jules César du calendrier julien qui fixe le solstice au 21 décembre – mais l’habitude de le fêter le 25 décembre a alors perduré), marquant le moment où la nuit cesse de croître et où le jour augmente, le moment où la lumière nous rejoint dans nos ténèbres. Ne dit-on pas que Jésus est le soleil de justice ? Voilà que dans l'Empire romain, on fêtait ce jour-là la fête du soleil, et voilà que le christianisme a triomphé dans l'Empire même, après trois siècles de suspicion et de persécutions récurrentes. Certes le temps est resté le temps, l’Empire est resté l’Empire, persécutant à leur tour bientôt, hélas, tous ceux qui n’étaient pas chrétiens, juifs comme païens. Mais les plus sages ont discerné quand même dans cette rencontre d’une fête solaire un signe que ceux qui se veulent les plus savants d'aujourd'hui ne savent pas reconnaître parce que cela ne correspond pas à la rigueur de l'Histoire.

Dans l'Histoire historienne, Jésus n'est pas né un 25 décembre ? Certes. Mais si l'on est attentif on peut être à même de percevoir qu'il est aussi une autre dimension. Rappelons-nous que les anges ont empli les cieux de leur louange au jour de la naissance de Jésus. Et que le temps des anges n'est pas le nôtre, qu'il est entre le nôtre et celui de Dieu, où « mille ans sont comme un jour » (Psaume 90 / 2 Pierre 3). Si, en toute rigueur historienne, Jésus n'est effectivement sans doute pas né un 25 décembre, ne sont-ils pas éclairés de ce qu'il est des réalités au-delà des nôtres, ceux qui ont soupçonné les vérités de ce temps des anges, un temps dont le vrai signe dans notre temps est effectivement le 25 décembre. Ici le jour nouveau se lève, brillant d'une lumière dont on ne soupçonnait pas même l'existence, on passe des temps nocturnes aux temps solaires, au temps du soleil de justice, qui concerne tous les peuples, qui concerne les païens.

Et voilà que l’on date à présent nos siècles à partir de sa naissance. Et que l’on est passé avec le Christ à un calendrier solaire – car le calendrier biblique est lui un calendrier lunaire, luni-solaire, au cœur duquel est inscrite aussi la promesse de la lumière, exprimée par la fête juive de Hanoukka, célébrée aussi en ces temps de solstice d’hiver. Voici, avec Jésus, un nouveau calendrier, solaire, dont le premier mois, janvier, est celui qui succède immédiatement à celui de sa naissance, huit jours après, c’est-à-dire le jour de sa circoncision – selon le temps angélique s'entend –, là où auparavant l'année commençait en avril. Que celui-là voie, qui a des yeux pour voir, est-on tenté de dire, pour dépasser, comme l'ont dépassé les Évangiles, le problème de savoir si c'est là le Messie biblique ou s'il concerne les païens.

oint de contradiction ici : le Messie de la Bible concerne bien aussi les païens. C'est vers lui, vers sa lumière, que sont venus, guidés par l'étoile confuse de leur confuse astrologie, les Mages, ces païens d'Orient. C'est vers lui que se dresse l'arbre de Jessé, père de David, comme l'arbre de toute la création qui se dresse vers sa lumière qu'annonce cette même étoile des Mages.

Et à y regarder de près, les yeux de la foi découvrent alors que cette fête que l'on voudrait dénoncer comme païenne est celle de la bonne nouvelle du salut de Dieu pour les païens, que représentent ici les Mages. Elle est celle du chant de toute la création à la rencontre de la lumière à laquelle elle est appelée.

Car c'est bien là le sens de l'arbre de Noël, figure de celui de Jessé et de celui de toute la création que Dieu fait croître à sa rencontre. Symbole païen ? Introduit en fait par la réforme luthérienne pour symboliser la vérité du 25 décembre, celle de la naissance du Christ. Un arbre qui se dresse vers la lumière annoncée par l'étoile, comme celui de la famille de Jessé et de David vers le Messie et celui de toute la création vers son salut. Cela en passant par la faute même qu'il s'agit de couvrir, symbolisée par les boules de nos arbres, qui sont au départ simplement des pommes stylisées – pommes (malum en latin), pommes du bien et du mal, mal (malum aussi en latin) – englouti par le Christ dans la lumière, qui dès lors parcourt toute la création, lumière figurée elle par les guirlandes de lumière qui courent dans tout l'arbre.

t le père Noël, avec ses allures de lutin des cultes scandinaves ? On a évoqué l’histoire des Mages, ces païens qui menaient des cadeaux aux pieds du Messie biblique, aux pieds d'un enfant né dans les ténèbres de l'humilité – la nuit, donc, dans le temps angélique – pour couvrir de lumière jusqu'à sa Galilée païenne.

Il enseignera, ce Messie, que les plus petits que nous croisons sont lui-même venu dans le secret. C'est là ce qu'a très bien compris un évêque de l'Antiquité, nommé Nicolas, devenu saint Nicolas parce qu'il ne supportait pas, lui disciple d'un enfant pauvre, de voir la misère, plus particulièrement celle des enfants. Alors en secret, il leur faisait des cadeaux qui allégeaient leur peine, comme les Mages offrant leurs dons au Christ.

Plus tard, toujours la réforme luthérienne – fructueuse en pays scandinave – découvrait que saint Nicolas, dans son humilité, dévoilait des actions angéliques. Derrière saint Nicolas, un simple homme, s'ouvre le monde angélique, dévoilant lui-même la réalité de Dieu. Un ange est derrière saint Nicolas, comme derrière les Mages, étrangers en visite, rappelant les étrangers visitant Abraham, et dans lesquels le patriarche reconnaissait le présence angélique, et la présence de Dieu même lui annonçant la naissance de son enfant. Un ange est derrière saint Nicolas, ange qui sera figuré sous les traits des anges scandinaves, elfes et lutins. C'est la figure du père Noël, que dévoile saint Nicolas, une figure angélique du don gratuit.

lors contrairement à ce que s'imaginent certains de ceux qui croient savoir, le père Noël existe, manifestation angélique de l'art de donner dans le secret, de l'art de donner de la joie à ceux qui ressemblent au Messie nouveau-né dans sa crèche.

Et derrière cette figure angélique, il y a au plus haut des cieux, comme le crient les anges effectivement présents à Noël selon les Évangiles, la présence du don suprême, le grand cadeau de Dieu par lequel la paix vient sur la terre aux hommes dans sa bienveillance – don de Dieu réconciliant le monde avec lui-même (2 Co 5), rassemblant le monde de la Bible et celui des païens, le cadeau par lequel il déploie éternellement son amour envers nous.

RP


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