"[…] condamné à l'escalade subversive. De par la concurrence et l'usure des signes. Ce qui commence comme sélection, marginalité d'un petit groupe tombe très vite dans la consommation de masse. […]
La subversion se radicalise, accède à la plus grande transgression possible dans le mondain […]
Alors la contestation mondaine atteint le moment dialectique de sa plus grande contradiction interne : contradiction entre l'institutionnel et la subversion. Car ce qui se dit contestation n'est qu'initiation mondaine, niveau supérieur de l'intégration au système, à la société permissive."
Michel Clouscard, Le capitalisme de la séduction, éd. Delga 2015, p. 120-121
Illustration (en Hongrie actuelle) :
Conclusion (Who : "We won't get fooled again") :
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"Le piège à éviter, c'est de se jeter dans le moderne. Tout le monde veut être moderne et, comme si ça ne suffisait pas, tout le monde veut être rebelle par-dessus le marché. Pour être au goût du jour, tout le monde cherche à grimper dans le train déjà bondé des mutins de Panurge. C'est un joyeux tintamarre, plein d'argent comme jamais, ou plutôt comme toujours. Les mauvaises manières en plus. Tournent dans ce manège non pas tant, comme on pourrait s'y attendre, les plus déshérités, les hors-la-loi, les laissés-pour-compte de l'histoire, mais surtout, sans vergogne, ceux qui ont déjà tout et qui veulent encore le reste, les banquiers ivres de Chine, les milliardaires en perdition qui, à défaut de rendre l'argent, en disent au moins du mal. Le comble du moderne, c'est à la fois de passer pour rebelle, d'avoir le pouvoir et d'être plein aux as. Ah ! bravo ! Quel chic !
Être résolument moderne est une tentation que j'ai fini par repousser. Pour la bonne raison que le moderne sent déjà le moisi."
(Jean d'Ormesson, Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit, roman, éd. Robert Laffont 2013)